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mardi 7 juin 2016

La livraison des repas aux employés en Inde dans le film "The Lunchbox" (2013)

The Lunch Box est un film surprenant. Ni dans sa réalisation, ni dans sa trame, si ce n’est qu’elle narre la correspondance entre une jeune hindoue que son mari délaisse, avec un employé administratif, chrétien, sur le point de partir à la retraite, et qui doit être remplacé par un collègue, musulman, qu’il a du mal à supporter.
Au-delà des différences religieuses et culturelles des trois protagonistes, ce que nous enseigne le film de Ritesh Batra, c’est une pratique totalement inattendue. En effet, chaque jour à Bombay, ce sont environ 200 000 gamelles (dabba) qui sont préparées à la maison par les épouses ou même par des restaurateurs pour les célibataires et livrées par tous les moyens de transports imaginables par les dabbawallahs aux employés de bureau sur leur lieu de travail. C’est à la suite d’une méprise dans la livraison du repas de son époux que Ila Singh, une jeune femme au foyer commencera une relation épistolaire avec  Saajan Fernandes, sous forme de petits mots joints à la gamelle qu’elle prépare chaque jour.
Sur le contexte professionnel, on peut noter que, à quelques détails près, l’entreprise indienne est peu différente de nos administrations européennes : les employés y occupent un open-space où les bureaux sont disposés en ligne, tous tournés dans la même direction. Et quand les résultats ne sont pas à la hauteur des objectifs, le « chef » vous reçoit dans son bureau pour une remontée de bretelles en règle. Mais heureusement, se retrouver seul dans le réfectoire à l’heure du déjeuner pour déguster le repas amoureusement concocté par une jeune femme et livré par le dabbawallah, apporte tout le réconfort possible …
Un dabbawallah


samedi 19 mars 2016

Le licenciement dans un tube du chanteur italien Luciano Ligabue : Non ho che te (2015)

Notre Schmoll national avait décrit avec une grande justesse le désarroi vécu par un cadre victime de la perte de son emploi, (voir notre article : Les effets de la crise économique dans les années 1970 : "Il ne rentre pas ce soir", une chanson d'Eddy Mitchell). Le ton en est si juste que, récemment, au cours d’une émission diffusée sur France 3 consacrée à son compère (Eddy Mitchell Itinéraires), Jacques Dutronc déclarait qu’Eddy Mitchell n’avait pas besoin de pousser sa voix pour interpréter cette chanson. Un titre qui exprime aussi le sentiment d’inutilité frappant un homme dans une société misogyne où le « mâle » a depuis toujours pourvu aux besoins du foyer. Dans un pays tout aussi teinté de machisme que le nôtre, l’Italie, c’est le chanteur très populaire LucianoLigabue qui communique avec autant de force et d’acuité la détresse subie par un homme dans la force de l’âge à qui l’on annonce du jour au lendemain, qu’il a perdu son travail : hanno detto avete perso il posto (di lavoro). Si ce salarié qualifiait son job d’infect (infame), il le respectait néanmoins, l’ayant toujours appelé « son travail » (l’ho chiamato sempre il mio lavoro), et s’il fait un parallèle avec l’enfer, c’est bien au moment de son licenciement qu’il plonge dans l’abîme.
Il ne manque pas d’évoquer quelques éléments pragmatiques, liés à son âge ou à des considérations financières : l’âge de départ à la retraite qui augmente (ci han spostato sempre un po più avanti la pensione) et la banque, où « ils sont gentils mais ne veulent rien donner … la même gentillesse que le serpent » (in banca son gentili ma non mi danno niente la stessa gentilezza del serpente). Et les jours passent, interminables (i giorni sono lunghi, non vogliono finire), pendant que le syndicat appelle à une nouvelle mobilisation pour ceux qui restent (il sindacato chiede un’altra mobilitazione per quelli che ci sono ancora dentro). Et puis, sans que ce soit  une consolation, le patron ne semble pas être au mieux : les yeux gonflés, la chemise froissée, quand il rencontre son ancien salarié, il détourne le regard, les yeux vides, la barbe négligée (ho visto il titolare aveva gli occhi gonfi, la giacca da stirare mi ha visto, si è girato, stava male aveva gli occhi vuoti, la barba da rifare).
Comme dans la chanson d’Eddy Mitchell, le plus pénible, c’est  l’impression d’inutilité, le sentiment de culpabilité exprimé par un refrain scandé à l’adresse de la compagne de ce « disoccupato » : je te demande pardon si je t’offre aussi peu (ti chiedo scusa se ti offro così poco), je te demande pardon si je ne te donnerai pas assez, je te demande pardon si je te demanderai de la patience (ti chiedo scusa se non ti darò abbastanza ti chiedo scusa se ti chiederò pazienza). Un refrain qui finit par une imprécation afin de ne pas être abandonné, qui donne son titre à la chanson du rocker transalpin : je n’ai que toi, je n’ai que toi (non ho che te).
Tout autant que « Il ne rentre pas ce soir », la musqiue de « non ho che te » n’a rien d’un blues mais bénéficie d’un rythme enlevé qui renforce le réalisme d’un texte dont la mise en image du clip est particulièrement bien adaptée.

Pour aller plus loin : le texte intégral de la chanson


mercredi 2 décembre 2015

L'Italie au travail dans un livre de photos de Gianni Berengo Gardin (Editions La Martinière)

La photographie n'est pas absente des arts qui immortalisent le monde du travail. Bien que l'image soit figée, elle nous renseigne assez précisément sur le contexte dans lequel s'exercent les métiers et les professions au fil du temps. L'oeuvre de l'italien Gianni Berengo Gardin en constitue un exemple probant. Dans le livre publié par Les Editions de La Martinière il y a quelques années (2005 ?), le monde du travail apparaît dans plusieurs des chapitres de ce très beau volume.


C'est le plus logiquement dans la partie "Travail" que l'on voit des scènes de travaux des champs, telles la récolte des olives en Italie ou les moissons, mais aussi des photos représentant des ouvriers sur des chantiers navals, apparemment en train d’exécuter des opérations de maintenance. Un autre cliché montre un groupe d'hommes se dirigeant en ordre dispersé vers les grues d'un port de commerce, peut-être à l'issue du déjeuner. D'autres images représentent des scènes se déroulant dans les gares ferroviaires. Sur deux photos différentes, c'est l'artisanat qui est mis à l'honneur puisque l'on voit des miches de pain disposées sur des planches, portées par des personnes, dans la rue ; certainement des livreurs. et peut-être en forme de clin d’œil, c'est aussi un photographe ambulant qu'il est loisible d'observer au premier plan d'une prise de vue, tenant dans les mains un appareil en piteux état, alors qu'à l’arrière plan, un écolier en blouse, peut-être son dernier modèle, semble s'échapper sur le trottoir.
Dans la partie "A Venise", on peut voir un facteur arrêté sur la route devant son vélomoteur ou encore des dockers manipulant de lourds câbles destinés à amarrer les bateaux aux bittes du quai, mais aussi des artistes de cirque à l'échauffement, une femme soignant un cheval, des boxeurs, ainsi que des opérateurs de fabrication à l'oeuvre sur des chaînes mécanisées. Le plus surprenant et le plus réaliste réside dans une photo qui montre un policier en civil en train d’arraisonner un malfrat allongé au sol sous l’œil d'agents en uniforme, en pleine rue.
Le chapitre "Femmes", tout logiquement, permet de contempler des ouvrières agricoles au travail ou des femmes dont on ignore le statut, salariées ou épouses d'agriculteurs, qui disposent des écheveaux de fibres sur des tréteaux pour les faire sécher au milieu de la rue d'un village.
Les relations au monde du travail dans le chapitre "Empathie" se limitent à deux scènes de manifestations de rues, menées par ceux qui semblent des ouvriers, dont certains affichent une banderole sur laquelle est inscrite le slogan "No alla cultura dei padroni", c'est à dire "Non à la culture des patrons". Quant à la partie "Paysage", une vue laisse imaginer deux sauniers (ou saulniers) marchant au bord d'un marais salant, portant sur l'épaule leur outil servant à récolter le sel.
C'est très naturellement, du moins chronologiquement, dans la dernière partie du livre, "Vie de province" que Gianni Berengo Gardin nous dépeint la fin de la carrière. Ce sera sous la forme d'un groupe d'hommes âgés, tous revêtus d'un couvre-chef, chapeau ou casquette, assis face au photographe, tournant le dos à l'entrée d'un local au fronton duquel est inscrit "Societa operaia" (société ouvrière). Ce qui laisse penser que ce sont les membres d'un cercle de retraités d'une Société de secours mutuel, comme il en existait beaucoup en Italie. qui se retrouvent quotidiennement pour bavarder, jouer aux cartes, ou passer le temps.

mardi 15 janvier 2013

Cinéma : Mammuth, pas une retraite de réussie pour Depardieu avant sa retraite de Russie

Avant sa retraite en Russie dont la presse s’est fait largement l’écho, Gérard Depardieu était à l’affiche d’un film qui ne traitait pas du monde du travail, mais de la fin de carrière, et donc du départ à la retraite. Bien que réalisé par les fantasques auteurs de Groland, la mythique émission de Canal +, le sujet de la retraite est abordé dans un premier temps sobrement, bien servi par un Gérard Depardieu dans le rôle de Serge Pilardosse, ouvrier des abattoirs, et Yolande Moreau, qui joue son épouse, elle-même employée de grande surface. Les premières scènes apparaissent très réalistes, les gestes de Pilardosse maniant la scie ou le couteau pour couper la viande sont précis, les situations vécues par son épouse dans le supermarché qui l’emploie sont plausibles, comme par exemple le stress généré par sa peur de « finir » au rayon poissonnerie.
Le départ à la retraite de Pilardosse reste crédible et en rien caricatural, n’était-ce la teneur du cadeau qui lui est remis à cette occasion, un puzzle, et le fait que le bénéficiaire ignore en tout point ce qu’il va percevoir.  Dans la réalité, le salarié demande une situation au regard de la retraite à la CARSAT (ex-CRAM) ce qui détermine son choix de faire valoir ses droits ou pas.
Notre principal protagoniste se retrouve dans une situation compliquée puisque ses anciens employeurs ne l’ont pas tous déclaré et versé les cotisations correspondantes aux caisses de retraite obligatoires ou complémentaires. La quête de ses points de retraite sera l’objet d’un road movie qui l’ emmènera sur la route de son passé au travers de scènes surnaturelles dans lesquelles les réalisateurs, Benoît Delépine et Gustave Kervern laissent libre cours à leur imagination, dans l’esprit des Groland.