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dimanche 2 mars 2025

L'emploi précaire dans l'après-guerre en Italie dans le film "Deux sous d'espérance" de Renato Castellani (1952)

"Due soldi di speranza" (Deux sous d'espoir) constitue le dernier volet d'une trilogie du réalisateur italien Renato Castellani. Distribué en 1952, il pourrait figurer un archétype du cinéma néo-réaliste transalpin puisqu'il montre largement la vie d'après guerre dans ce pays où la population a souffert du fascisme, puis de l'invasion nazie et enfin de la libération opérée par les alliés. Aucune référence à la guerre ou à la politique, excepté quelques rares scènes où le principal protagoniste, Antonio (Vincenzo Musolino), se rend la nuit à Naples pour aider les communistes locaux à coller des affiches afin de compléter sa maigre rémunération d'assistant bedeau dans le village de Cusano où il vit difficilement depuis sa démobilisation. Il perdra cette charge quand le prêtre aura vent de cette activité, ce sera toutefois la seule confrontation à distance entre l'église et le communisme.

Sous l'angle du monde du travail l'intérêt principal de ce film réside dans la vision qu'il offre de la façon dont la population masculine, essaie de s'en sortir, par le travail, ou par des expédients, sans tomber dans le trafic ou l'illégalité, même si, excepté peut-être celui du Parti Communiste, la plupart des emplois ne sont certainement pas déclarés. Mais nous n'aurons indication à ce sujet pour aucuns d'entre eux. 

Afin de constituer un trousseau pour sa sœur, déshonorée par un vieux célibataire, mais aussi pour demander la main de Carmela (Maria Fiore) à son père, avec peut-être l'espoir d'intégrer l'entreprise familiale florissante de fabrication de feux d'artifices, Antonio remplira d'abord des bouteilles de limonade pour le compte d'un débit de boisson du village, vendra des légumes sur le marché, puis gagnera quelques pièces en assistant les cochers dont les calèches peinent à grimper la montée qui ponctue le trajet entre la gare et le bourg. A ce moment, il aurait dû occuper le poste de chauffeur de bus de la compagnie créée par ces mêmes cochers sous forme de coopérative dans le but de contrer les plans du Maire qui envisageait de mettre en place un service régulier de transports en bus. L'entreprise prendra fin avant même d'avoir commencé en raison du manque d'entente des associés. 

Antonio sera donc successivement assistant du bedeau et colleur d'affiches puis coursier pour les propriétaires de 3 cinémas, parcourant les rues de Naples à bicyclette pour livrer les bobines de films, une scène qui fait immanquablement penser à "Nuovo Cinema Paradiso" film beaucoup plus récent de Giuseppe Tornatore. Il s'attirera les faveurs de la mère de famille puisque, en plus de son travail, il fait don de son sang pour favoriser la croissance de son garçonnet. Ce qui lui permettra d'accéder au titre de projectionniste, enfin un vrai métier, qu'il perdra aussitôt à cause de sa promise, aussi amoureuse qu'écervelée. 

Dans cette période d'après-guerre telle qu'elle est dépeinte ici dans le sud de l'Italie, la région Campanie, pour être plus précis, le fait marquant est le manque cruel de travail et donc de ressources pour les familles. Les hommes se présentent chaque jour devant la grille d'enceinte de l'église et passent là une partie de la journée à attendre un hypothétique emploi, préférant parfois refuser un travail peu intéressant et pas beaucoup plus rémunérateur que les indemnités chômage, puisque le système a le mérite de déjà exister.  Les emplois proposés, quand ils existent, sont ceux de manoeuvre, peu payés et peut-être rarement déclarés.


samedi 1 mars 2025

L'esclavagisme moderne dans le film italien "Una promessa" (Lo spaccapietre) des frères De Serio (2020)

De ce long métrage des frères jumeaux Gianluca e Massimiliano De Serio, nous ne retiendrons pas spécialement l’intrigue tant elle manque de clarté. Ou peut-être des éléments dans le récit font-ils défaut ? Une fois encore c’est le contexte qui nous intéresse puisque la plus grande partie du film se déroule au sein d’une exploitation agricole ou maraîchère dans laquelle on cultive des légumes et de la vigne de manière intensive.

Cette entreprise s’appuie principalement sur le travail illégal, la main d’œuvre est constituée d’africains, essentiellement des hommes mais également de quelques italiens. Ils sont payés en liquide, à la bonne grâce de l’employeur ou plutôt de son garde chiourme, son homme à tout faire avec qui il terrorise ces nouveaux esclaves. En rôdant par exemple la nuit au milieu des baraquements de fortune où vivent ces pauvre hères, armé d’un fusil et tirant sur ces habitations sommaires faites de toile en plastique. Le boss impose également ses caprices à une femme, à qui il demande par exemple d’éventrer un porc fraichement abattu, ou de mimer une scène bestiale en duo avec Giuseppe, le personnage principal du film.

Celui-ci a perdu son travail dans une carrière, sans que l’on sache s’il était déclaré, suite à un accident qui lui a coûté un œil. C’est son épouse qui subvient aux besoins du couple et de leur fils, en travaillant justement dans cette exploitation agricole où elle perdra la vie en raison, peut-on supposer, des dures conditions et peut-être des mauvais traitements des tortionnaires. N’ayant d’autre alternative, Giuseppe (Salvatore Esposito) rejoindra cet enfer en compagnie de son jeune fils et subira lui aussi de mauvais traitements.

Sur un plan purement professionnel, il nous est donné de voir le travail dans les champs, dans des scènes à peine réalistes. En effet, quand Giuseppe recouvre de terre les bords des films plastiques déroulés dans les champs, l’utilité de la tâche ne semble pas flagrante. Quand, par contre, toujours aidé de son fils, il troue ces mêmes bâches pour y planter des végétaux, ou qu’il répand des produits phytosanitaires à l’aide d’un pulvérisateur ou d’une cuve attelée à  l’arrière d’un tracteur, on peut noter davantage de réalisme.

Si l'on veut prendre un peu plus de recul, il est légitime de s'interroger sur la pertinence des éléments de contexte. Certes, le travail illégal existe, notamment dans le secteur agricole et probablement dans l'Italie, et en l'occurrence l'Italie du Sud. Cependant, la présence de ressortissants italiens dans les rangs de ces esclaves modernes paraît surprenante. D'autant plus que dans certaines situations, aiguillés et assistés par les travailleurs étrangers, il semble même que ce soient eux les migrants. Enfin, au delà des relations nécessaires à la trame du film, aucune indication n'est donnée sur la vie sociale dans ce monde du travail illégal.

La bande annonce du film "Una promessa"




dimanche 23 février 2025

Le domaine des services à la personne dans le dernier film de Robert Guédiguian "La pie voleuse"

 

Le dernier film de Robert Guédiguian ne nous plonge pas vraiment dans le monde très exigeant des services à la personne, mais il en prend le prétexte pour tisser les liens entre les différents protagonistes de ce long métrage où le réalisateur reconstitue une fois de plus sa bande autour de la sémillante Ariane ASCARIDE.

Celle-ci interprète le rôle d’une femme dont on ignore l’âge, qui dispose d’une pensions de retraite mais qui doit cependant continuer à travailler pour, permettre à son petit fils de se payer des cours de piano afin de, peut-être, intégrer le conservatoire, et d’autre part, éponger les dettes de son mari, qui lui, doit se contenter d’une retraite très faible et  qui passe ses journées à jouer aux cartes.

Du métier d’aide à domicile, tel qu’est dénommé ce métier, il ne nous est pas permis d’en voir toute l’intensité, à peine du nettoyage et de la cuisine. Ce film nous donne cependant un aperçu de la gestion du temps de ces salariés d’agences de services à domicile qui doivent enchaîner les tâches et se presser de rejoindre le foyer suivant où la première tâche consiste à pointer à l’aide d’un boîtier accroché au mur, chez le bénéficiaire. Toutefois, et contrairement à la réalité, Maria (Ariane Ascaride) ne semble pas spécialement prise par le temps, se permettant même de faire quelques courses, certes au profit des bénéficiaires, la plupart étant des personnes âgées. Certes, on peut supposer qu'elle ne travaille pas à temps plein, et le fait de s'attarder au domicile de ces personnes lui permet aussi de fureter et de chaparder de l'argent, quand elle "n'emprunte" pas des chèques comme chez Monsieur Moreau (Jean-Pierre Darroussin), pour payer les cours de piano de son petit-fils. La fraude ne sera découverte que fortuitement, lorsque le fils de Robert Moreau sera contacté par le magasin de musique qui a livré le piano chez la fille de Maria, le chèque de caution ayant été détruit suite à un dégât des eaux consécutif à une tentative d'effraction dans ce commerce d'instruments de musique.

Peut-être que les victimes fermaient les yeux, appréciant la mansuétude de Maria à leur égard, eux qui souvent vivent désespérément seuls, même lorsqu'ils sont en couple, ne recevant aucune visite, excepté celle de leur assistante à domicile avec qui ils tissent un lien de confiance plutôt fort. Ils retireront finalement leur plainte. 

La confiance est d'ailleurs, très certainement, l'aspect le plus marquant de ce métier que l'on peut retenir de ce film plaisant, qui ne nous montre rien d'autre de la profession, ni avec maria, ni avec la collègue chargée de la remplacer durant sa suspension en raison de ses méfaits.



samedi 23 mars 2024

"Toni Erdmann" : le monde du conseil et de l'audit international dans un film allemand de 2016 avec Sandra HULLER


Bien avant d'être remarquée pour sa magnifique interprétation dans le multi-primé "Anatomie d'une chute", l'actrice allemande Sandra HULLER interprétait le rôle principal dans le film "Toni Erdmann" en 2016.

C'est l'histoire, plutôt originale, d'un père qui se rend compte que sa fille, consultante pour une grand cabinet international, occupe un poste important empreint de responsabilités, mais que sa vie est insipide.  A l'occasion de l'anniversaire de sa grand-mère maternelle, son père la surprend en train de feindre une conversation téléphonique à caractère professionnel. Elle mène une existence totalement fausse, soumise au monde sans pitié du capitalisme. Quand ce n'est pas elle-même qui instaure une pression, certes sans violence, à sa collaboratrice. Elle lui demandera par exemple de lui prêter son chemisier pour assurer une présentation devant un important client puisqu'elle a tâché le sien de sang. 

Ines Conradi est donc une consultante de haut vol, expatriée à Bucarest, qui cherche à convaincre une grosse compagnie pétrolière américaine de se restructurer, ici en Roumanie, avec à la clé des suppressions de postes, ce qui ne lui pose aucun cas de conscience. 

L'aspect professionnel tel qu'il est décrit demeure plausible, les journées d'Ines sont ponctuées de réunions animées à l'aide de présentation vidéoprojetées, de visites de sites industriels, de réception en ambassades, et de négociations. Inès est très investie dans sa mission, elle cherche à évoluer et doit normalement prendre un poste plus important en Chine. Elle en paie le prix fort puisqu'elle ne relâche jamais la pression et ne laisse jamais rien au hasard, elle cherche régulièrement à s'évaluer et bénéficie même de l'apport d'un coach extérieur. Les luttes de pouvoir entre les différents collaborateurs est perceptible, cependant, il semble que tous soient très vigilants au respect de l'égalité et de la diversité. Le sexe et la drogue font bien sûr partie de cet univers, comme tout le reste, ils semblent programmés, organisés comme toute la vie de ces businessmen.

Son père interviendra tel un chien dans un jeu de quilles dans ce contexte de mondialisation, et aidera sa fille à ouvrir les yeux sur le peu de moralité de sa fonction, en comprenant que tout n'est pas si manichéen. Ce sera l'occasion de scènes plutôt drôles bien que peu réalistes. Inès finira par organiser une réunion dans sa suite où elle demandera à ses collègues, sa collaboratrice et son responsable de venir nus. Ce que la plupart exécuteront, pris par l'aveuglement inhérent à ce monde sans foi ni loi.

Le film a bénéficié d'un excellent accueil au Festival de Cannes (2016) au cours duquel il a obtenu le Prix de la critique internationale.


samedi 9 mars 2024

Les métiers de la restauration et des traiteurs dans le film "Le sens de la fête" de Olivier Nakache et Eric Toledano

Si les français disposent du sens de la fête comme l'évoque un indien au milieu de cette comédie humaine, il faut  reconnaître à Éric TOLEDANO et Olivier NAKACHE la capacité de caricaturer les individus et leurs fonctions. C'est à nouveau dans ce film, Le sens de la fête. Souvent drôles et sans jamais tomber dans la caricature, ils arrivent à portraitiser cette galerie de métiers de la restauration dans le cadre d'une activité de traiteur. 

Le patron, c'est Jean-Pierre BACRI, excellent comme toujours, qui doit orchestrer une prestation au pour le compte d'un couple le jour de leur mariage. C'est l'occasion d'observer les différents métiers de cette profession, essentiellement du côté du service, parfois de l'animation et rarement de la cuisine. D'autant plus que les facéties d'un extra embauché au dernier moment, incapable et stupide, ruine une partie du repas.

Dans ce film, la vision des métiers et compétences de ce secteur d'activité n'est pas très large et profonde, il en donne cependant un bon aperçu au titre des enjeux et contraintes, essentiellement liées à la gestion du personnel. Les difficultés de recrutement, par exemple, ou l'aspect social avec des extras pas toujours déclarés, et des exigences en matière de relation avec les clients. Les normes d'hygiène et de sécurité alimentaires sont également perceptibles, à l'occasion donc de l'une des turpitudes du nouvel embauché.

En résumé, un film divertissant avec une découverte de ce secteur confronté à des difficultés de recrutement.

La bande annonce du film :

lundi 13 juillet 2020

Les injonctions paradoxales dans le monde de l'assurance-vie au cinéma : "Maman a tort" (Marc Fitoussi - 2016)


La période d’application en entreprise a pu quelquefois servir de cadre à des fictions françaises ou étrangères. Dans le film « Maman a tort » de Marc Fitoussi, c'est le stage de découverte imposé aux élèves de classe de 3ème qui est le prétexte d'une immersion entreprise.
Comme la plupart des élèves de son âge, Anouk (Jeanne Jestinqui vit seule avec sa mère, a du mal à trouver une entreprise pour ce stage de 3ème. L'unique solution pour elle est d'accepter de passer cette semaine chez un caviste comme lui propose son père. Sa mère préfère finalement qu'elle intègre la compagnie d'assurance-vie où elle travaille. A cette occasion, la jeune fille découvrira sa mère sous un autre jour, se montrant inhumaine, notamment avec les clients. Sa fille comprendra qu'elle ne cède finalement qu'à la pression de sa hiérarchie.

Sur le fonctionnement d'une entreprise vu de l'intérieur, "Maman a tort" est assez réaliste, même si l'on voit les salariés essentiellement pendant les pauses, en train de fumer à l'extérieur sous des champignons chauffants, ou à l'heure du déjeuner. L'accueil et la sécurité ne sont pas des plus rigoureux ; faute de document d'identité, on peut tout de même rentrer dans les locaux. Si la pression latente touche essentiellement Cyrielle (Emilie Dequenne), la mère d'Anouk , on rencontre aussi une salariée à l'infirmerie qui dépressive se dit harcelée. Les relations entre collègues sont parfois tendues comme dans la vraie vie. Ainsi, alors qu'elle se sert au self, Cyrielle, la mère d'Anouk se fait agresser verbalement par une collègue qui lui reproche de l'avoir infantilisée lors d'une réunion. L'adolescente pensera venger sa mère en renversant un verre d'eau sur le bureau de la plaignante, puis s'apercevra que ce n'était pas son poste de travail. Une attitude pour le moins étonnante pour une aussi jeune personne.

Les métier de l'entreprise et son activité, l'assurance vie, sont peu visibles. Cyrielle tente d'expliquer ce qu'est "l'assurance emprunteur" à sa fille, qui comprendra un peu mieux à l'occasion d'une rencontre avec une cliente dont sa mère a refusé le dossier, et qui se trouve en conséquence en grande difficulté. Afin de comprendre l'attitude qu'elle juge inhumaine de sa mère, Anouk ira jusqu'à la rencontrer à l'extérieur de l'entreprise, ce qui semble peu plausible eu égard à l'âge théorique de l'adolescente, mais qui permet certainement d'alimenter le scénario.
Le comportement de certains salariés peut étonner. C'est le cas de la tutrice d'Anouk et de sa collègue dont on se demande ce qu'elles font de leurs journées, qui se montrent stupides et infantilisantes. Tout autant que le tuteur d'un autre élève, chargé de la distribution du courrier.

S'il n'est pas exempt d'intérêt, rien que pour la relation entre la fille et sa mère, ce film n'apporte rien  à la compréhension des mécanismes qui génèrent de la souffrance au travail. Il laisse en effet penser, que c'est uniquement la pression de la hiérarchie, obnubilée par les résultats qui en est la cause. Ce que la mère expliquera maladroitement à sa fille en excusant le comportement d'un supérieur : "Il est un peu au dessus de moi, il a tous les droits". Le plus crédible reste peut-être l'injonction paradoxale à laquelle est soumise Cyrielle, qui doit "maquiller" des dossiers pour éviter trop de remboursements aux assurés. Résignée, elle expliquera à sa fille qu'elle n'a pas le choix, que si elle n'a jamais démissionné c'estqu'elle n'a pas de diplôme et qu'elle a fait toute sa carrière chez Serenita.

La bande annonce de "Maman a tort"


dimanche 16 février 2020

La condition du personnel de maison au Chili dans le film "La Nana" (2009)

Ce film de 2009 du réalisateur Sebastián Silva nous plonge dans l'univers cossu de la bourgeoisie chilienne contemporaine, à travers le prisme de la vie d'une domestique. Il s'agit ici de Raquel, d'une méchanceté magistralement interprétée par Catalina Saavedra, qui est employée par une famille aisée, composée du père dont on ignore la profession et qui passe le plus clair de son temps au golf, de la mère, enseignante à l'université, d'un jeune fille, étudiante, d'un adolescent et de jeunes bambins. La bonne finira par s'ouvrir, suite à un problème de santé, à la faveur de l'arrivée d'une collègue chargée de l'assister et qui lui comblera partiellement le manque d'affection dont elle souffre finalement.

Ce film, "La Nana" est construit autour de la relation particulière, parfois intime voire ambigue qui se tisse entre la famille et cette employée, et sur son dévouement sans limite pour ses employeurs, au détriment de sa vie personnelle.

Sur les compétences propres à l'exercice du métier de domestique, ce long-métrage nous donne un aperçu des différentes tâches inhérentes à cette profession, sans moult détails, ce sont davantage les compétences comportementales qui sont mises en relief, en raison de la proximité de la bonne avec chacun des membres e la famille.

C'est plutôt sur l'emploi en général au Chili que le film nous livre des enseignements puisqu'on peut constater que de jeunes femmes viennent du fond de la province ou même du Pérou pour occuper ces postes de domestiques attachés au service de riches familles, quasiment disponibles 24 heures sur 24 et ne bénéficiant que d'un jour de congé par semaine.

Ce film a été primé, entre autres, au Festival du film de Sundance en 2009.

La bande annonce du film :



dimanche 10 septembre 2017

Une conseillère "emploi-formation" à l'A.F.P.A. dans le film "On a failli être amies" de Anne LE NY (2014)

Très à l’aise dans des rôles réalistes, qui mieux que Karin VIARD pouvait interpréter Marithé cette conseillère emploi de l’A.F.P.A. qui coache Carole qui elle, prend les traits d’Emmanuelle DEVOS dans ce film de 2014 d’Anne LE NY « On a failli être amies.

L’intrigue
Marithé, employée au sein de la principale association de formation continue nationale, accompagne un groupe de femmes qui ont été licenciées, lorsque fortuitement, Carole, épouse d’un restaurateur local réputé, débarque dans l’agence. Celle-ci travaille avec son époux mais, bien qu’elle s’en acquitte fort bien, elle a beaucoup de mal à l’assumer, développant même une crise d’exéma à chaque fois qu’elle assure sa fonction en salle. Elle cherche à s’évader au travers d’une relation adultère avec un expert-comptable, ce qui ne parait pas la satisfaire outre mesure. Marithé, divorcée, est elle aussi loin d’être comblée sur le plan affectif, et à la faveur de l’accompagnement qu’elle accepte de lui dispenser dans le cadre d’un bilan de compétences, elle rencontre Sam (Roschdy Zem), le mari de Carole, qu’elle commence par admirer pour l’assurance qu’il dégage, puis dont elle s’éprend. Elle manœuvre alors pour favoriser les projets de création d’entreprise de Carole, un Centre d’équitation en association avec son amant, dans le dessein d’écarter le seul obstacle qui se dresse sur le chemin qu’elle entreprend vers Sam. Ses plans ne se passeront pas comme prévu, elle se mettra même en péril à titre professionnel.

Le registre professionnel
Tout comme dans Ma part de gâteauKarin VIARD est « dans le rôle », totalement crédible : Marithé, conseillère emploi,  coache ses ouailles avec entrain et dynamisme, les incitant à un certain positivisme sans jamais tomber dans la caricature. Elle anime avec détermination des réunions d’aide à la recherche d’emploi , conduit des simulations d’entretiens de recrutement ou déroule consciencieusement  les tests de personnalités, sans s’offusquer des résultats saugrenus délivrés par l’ordinateur. C’est ainsi que Carole se voit orientée vers le métier de « fauconnier » certainement également pour les besoins du scénario. Ne lâchant rien, elle vit son sacerdoce à fond, sans états d’âmes, son existence étant  centrée  sur le devenir de ses protégées, elle va jusqu’à les  accompagner sur le terrain pour les aider à trouver un stage, ou intercède auprès d’une relation à la C.C.I. locale pour que Carole intègre une formation d’aide à la création d’entreprise.
Quand ses plans échouent, elle sombre alors dans un burn-out, c’est du moins ce que diagnostique son supérieur qui applique mécaniquement la procédure prévue dans ce cas : un accompagnement psychologique suivi d’une réorientation professionnelle. Marithé réagira curieusement, presque satisfaite d’être touchée par une pathologie somme toute « classique » en entreprise, comme si elle était finalement normale.

Toujours dans le contexte professionnel, ce film montre également quelques scènes courantes du monde du travail telles que des situations relationnelles ou managériales ou un départ à la retraite, l’occasion d’offrir des cadeaux mais aussi de danser ce qui semble peu usuel.  Il est aussi l’occasion d’explorer furtivement les arrières cuisines d’un restaurant gastronomique, pour quelques scènes de préparation ou de dressage d’assiette, ainsi que le service en salle sans que l’on y apprenne beaucoup sur cette branche professionnelle.

lundi 1 mai 2017

Le coaching managérial dans "Le coach", un film de Olivier Doran (2008)

"Le coach", film de 2008 de Olivier Doran respecte les codes de la comédie à la française qui n'a pas vraiment évolué depuis "La grande vadrouille" : deux individus qui n'auraient jamais dû se rencontrer, aux profils diamétralement opposés, finissent par trouver un intérêt commun et collaborent pour se sortir d'une situation qui s'annonçait pour chacun d'eux, très compliquée. Le premier des deux en l'occurrence, c'est un coach professionnel, addict au jeu, qui fuit un créancier à qui il doit une forte somme d'argent. Le second, cadre dans une entreprise, doit son poste et ses responsabilités à un quiproquo : il a été embauché parce qu'il porte le même nom que le neveu du Président du groupe, ce qu'il n'a jamais démenti afin de profiter de la situation.
Face à l'enjeu que représente la signature d'un important contrat avec un client chinois, Monsieur Hu, et en raison des insuffisances de Patrick Marmignon, la direction d'ILB sollicite Maxime Chêne pour coacher ce manager qui présente une trop grande empathie avec son équipe et un manque criant d'autorité.
Au cours des péripéties accompagnant l'hypothétique signature du contrat au cours de revirements qui ne sont pas sans rappeler les sautes d'humeur de Monsieur De Mesmaeker dans Gaston Lagaffe, la bande dessinée de Franquin, le consultant distillera au cadre supérieur de précieux conseils basés entre autres sur la P.N.L. (Programmation Neuro Linguistique) pour l'aider à s'affirmer. Le résultat sera probant, le client acceptera finalement de confier le projet à I.L.B., soit la réalisation en France d'un bâtiment commercial de grande ampleur.
Si, dans cette comédie, les techniques utilisées par le coach restent plausibles, la crédibilité du contexte professionnel est dû, avant tout aux talents des 2 principaux comédiens, Jean-Paul Rouve en "coaché" et Richard Berry, qui évitent de faire tomber le film dans la caricature bien que parfois, le côté comique ne parvienne pas à gommer totalement l'invraisemblance de certaines situations. Le dénouement final, par exemple, manque totalement de réalisme, ce qui n'est pas il est vrai la principale caractéristique dans ce genre cinématographique.
Quelques fonctions auraient mérité un peu plus de profondeur, telle celle du collègue jaloux et envieux qui met des bâtons dans les roues des héros de cette fiction, et c'est surtout celle de la D.R.H. qui est ici réduite au rôle de faire valoir au service de l'intrigue, et dont la principale qualité réside dans un physique avantageux. Si sur le plan de l'entreprise, les apports sont limités, "Le coach" reste un film divertissant.
La bande annonce du film :



mercredi 27 juillet 2016

Un représentant de commerce en produits pharmaceutiques dans les années 50 : « Le bigame » de Luciano Emmer (1956).

Dans cette comédie de 1956 de Luciano Emmer, Marcello Mastroianni interprète le rôle de Mario De Santis, un représentant de commerce pour une marque de dentifrices. Il sera accusé de bigamie et incarcéré, avec pour conséquence, le risque de perdre sa fiancée. Il se sortira de cette situation après moultes péripéties, avec le concours d’un avocat fantasque, « l'onorevole Principe » sous les traits d'un impayable Vittorio de Sica.
C’est essentiellement au début de ce film que l’on peut voir Mario dans sa fonction de représentant, assurant la tournée de ses clients, dans une attitude caricaturale, mais peut-être pas aussi lointaine de la réalité de l’époque. Séducteur, il use sans cesse de ses charmes pour convaincre les jeunes femmes travaillant dans les pharmacies de commander son Colodont anti caries, au désespoir des pharmaciens qui n’arrivent pas à écouler leurs stocks pléthoriques. Une démarche à la limite de l’arnaque, qui ne laissera pas une fois de plus une image glorieuse des métiers de la vente. Et ce n’est pas la surprenante  voiture en forme de tube de dentifrice de notre commercial qui donnera envie d’épouser … la profession de ce bigame !
Pour aller plus loin :

mardi 7 juin 2016

La livraison des repas aux employés en Inde dans le film "The Lunchbox" (2013)

The Lunch Box est un film surprenant. Ni dans sa réalisation, ni dans sa trame, si ce n’est qu’elle narre la correspondance entre une jeune hindoue que son mari délaisse, avec un employé administratif, chrétien, sur le point de partir à la retraite, et qui doit être remplacé par un collègue, musulman, qu’il a du mal à supporter.
Au-delà des différences religieuses et culturelles des trois protagonistes, ce que nous enseigne le film de Ritesh Batra, c’est une pratique totalement inattendue. En effet, chaque jour à Bombay, ce sont environ 200 000 gamelles (dabba) qui sont préparées à la maison par les épouses ou même par des restaurateurs pour les célibataires et livrées par tous les moyens de transports imaginables par les dabbawallahs aux employés de bureau sur leur lieu de travail. C’est à la suite d’une méprise dans la livraison du repas de son époux que Ila Singh, une jeune femme au foyer commencera une relation épistolaire avec  Saajan Fernandes, sous forme de petits mots joints à la gamelle qu’elle prépare chaque jour.
Sur le contexte professionnel, on peut noter que, à quelques détails près, l’entreprise indienne est peu différente de nos administrations européennes : les employés y occupent un open-space où les bureaux sont disposés en ligne, tous tournés dans la même direction. Et quand les résultats ne sont pas à la hauteur des objectifs, le « chef » vous reçoit dans son bureau pour une remontée de bretelles en règle. Mais heureusement, se retrouver seul dans le réfectoire à l’heure du déjeuner pour déguster le repas amoureusement concocté par une jeune femme et livré par le dabbawallah, apporte tout le réconfort possible …
Un dabbawallah


samedi 9 avril 2016

Au cœur d’une imprimerie et d’une blanchisserie dans « Le crime de Monsieur Lange » de Jean Renoir (1936)

Le crime de Monsieur Lange c’est avant tout un drame, qui finira donc tragiquement, du moins pour l’un des personnages de cette fiction de Jean Renoir de 1936. C’est aussi la vie quotidienne d’une arrière-cour parisienne située au milieu d’immeubles occupés par des entreprises, au rez de chaussée, ou par des locataires dont certains, d’ailleurs, travaillent dans la blanchisserie ou la maison d’édition où se déroulera l’essentiel de l’action. Nous ne nous attarderons pas plus longtemps sur cette trame qui verra un employé modèle, auteur de romans d’aventures à ses heures, assassiner un patron machiavélique, séducteur, manipulateur, magistralement interprété par Jules Berry, qui spoliera tour à tour ses salariés, ses fournisseurs et qui ira jusqu’à usurper l’identité d’un prêtre mort au cours d’un accident ferroviaire dont lui-même, alors en fuite, réchappera.
Car Le crime de Monsieur Lange c’est surtout l’atmosphère des ateliers d’imprimerie ou des bureaux de l’éditeur puisqu’à l’époque les deux fonctions sont cumulées, où les ouvriers ou employés évoluent dans un esprit de franche camaraderie qui les conduira à créer une coopérative, l’ancêtre des SCOP, dans un climat qui fleure bon le Front Populaire.
C’est le même esprit qui prévaut au sein de l’atelier voisin des blanchisseuses, les jeunes femmes semblent heureuses de leur sort, évoluant au milieu du linge tout en bavardant et jonglant avec les fers en fonte qu’elles approchent de leur joue pour en vérifier la température.
Ce n’est pas un hasard si ce film coïncide avec le début de la collaboration du maître avec le Parti Communiste Français dont l’un des points culminants sera la réalisation de La bête humaine en 1938, comme l’explique Antoine Rensonnet dans son excellent blog De son coeur le vampire.

Pour aller plus loin : un extrait du film ... sous titré en espagnol !



dimanche 21 février 2016

Mondialisation, logistique portuaire et une femme de ménage dans "Ma part du gâteau" un film de Cédric Klapisch (2011)

Cédric Klapisch a-t-il été trop ambitieux ou ne voulait-il simplement pas réaliser une véritable comédie sociale avec cette "Ma part du gâteau", son film de 2011 ? Alors que les ingrédients semblaient être réunis, le résultat est un mélange entre une critique de la mondialisation et de ses effets dévastateurs, une chronique de la lutte des classes au sein d'une entreprise du nord de la France, et une histoire d'amour qui serait banale si elle ne s'instillait entre deux personnes qui n'auraient jamais dû se rencontrer.
France, le personnage principal, personnifiée par une remarquable Karin Viard, est une mère courage qui élève seule ses trois filles, et qui doit aller travailler à Paris, suite à son licenciement provoqué par les affreuses spéculations de traders basés à Londres. Elle était jusqu'alors salariée dans une entreprise qui gère des containers, à Dunkerque, et se fait embaucher comme femme de ménage particulière chez Stéphane (Gilles Lellouche), justement  l'un des requins de la finance responsables de sa situation. Elle s'en rendra compte, après avoir eu une relation avec lui, favorisée par la proximité qu'elle développe avec son fils dont il ignorait pratiquement jusqu'à présent l'existence . S'apercevant qu'elle a été trahie par Stéphane, qui n'a aucun sentiment pour elle, et qu'il est à l'origine de la casse occasionnée dans son entreprise, elle le fera venir à Dunkerque après avoir kidnappé son enfant, et le "dénoncera" à ses anciens collègues. Le film s'achève alors qu'elle est emmenée par les gendarmes, le sentiment d'injustice n'en est que plus fort, tandis que lui même s'enfuit, poursuivi par les ouvriers de l'entreprise dont il a scellé le sort par ses spéculations.
Sur le monde du travail, si Cédric Klapisch nous montre un peu le monde des salles de marché et sa tension palpable, il nous dévoile à peine l'univers portuaire et la manipulation des containers, est esquisse tout au plus la lutte syndical pour la défense des emplois. Au  registre du métier de femme de ménage, les scènes sont elle aussi limitées, puisque France travaille seule au domicile du trader, où elle repasse, passe l'aspirateur, s'occupe de son fils ou, exceptionnellement, assure le service lors d'une réception organisée par Stéphane dans son luxueux appartement.

mercredi 10 février 2016

L'exploitation de carrières dans les îles Éoliennes dans "Vulcano" un film de William Dieterlé (1950).

La genèse de Vulcano est déjà à elle seule toute une histoire, intimement liée à celle du maître Rossellini, et de l’actrice Anna Magnani comme l’explique Telerama dans cet article. C’est la grandissime tragédienne que l’on trouve dans le rôle principal de ce drame réalisé en 1949 par William Dieterle qui raconte le retour d’une femme sur son île natale, assignée à résidence après s’être prostituée sur le continent, et qui souffrira de l’hostilité de la population. Magdalenna luttera pour éviter que sa jeune sœur, Maria, ne subisse le même sort qu'elle et ne tombe dans les griffes d’un souteneur.
Elle cherchera à subsister en travaillant, à cette occasion nous pourrons observer le travail dans une mine. Si un dialogue dans le film fait allusion au ramassage de pierres ponces, il s’agit plus vraisemblablement ici d’une carrière de souffre, ce qui  semble logique en raison du caractère volcanique de l’ile. Cet environnement peut être rapproché des images d’un autre film, "Fils de personne", qui lui se déroule dans une exploitation de marbre dans la région de Carrare.

Dans Vulcano, les scènes qui se déroulent dans la carrière montrent les hommes, positionnés au sommet de la montagne, qui à l'aide d'un pic, font tomber la poussière de roche ou le sable que les femmes chargent dans des wagonnets dont le contenu est ensuite vidé dans le précipice qui domine la mer. Les conditions de travail sont pénibles, accentuées par le soleil brûlant, la pause déjeuner est donc la  bienvenue. Elle est annoncée par le chef de chantier qui la sonne à l’aide d’un gros coquillage qui fait office d’olifant. Les ouvrières vont alors récupérer les panier-repas qu’elles ont apportés le matin, tandis que leurs collègues masculins dévalent la pente de la montagne en glissant harmonieusement sur leurs deux pieds, tels des skieurs, changeant de direction ou se freinant en plantant élégamment derrière eux leur outil.

samedi 23 janvier 2016

Monsieur Hulot dans l’industrie plasturgique : « Mon oncle », un film de Jacques Tati (1958)

En critique avisé de l’époque moderne voir moderniste au travers du regard ingénu et poétique de son personnage récurrent, M. Hulot, Jacques Tati ne pouvait faire l’économie d’une satire de l’entreprise industrielle du 20ème siècle. Dans « Mon oncle », son film de 1958, il s’attache à railler la société de consommation dont son héros à l’imperméable caractéristique est très éloigné, par la description d’une de ces familles résidant dans une de ces habitations futuristes que l’on nous prédisait à l’époque. Cette maison, située dans la banlieue parisienne est tenue par la sœur de Hulot, Mme Arpel, qui passe ses journées à jouer avec les tout nouveaux appareils électroniques qui lui jouent parfois des tours, ou qui effraient Georgette, la bonne. Elle refusera ainsi de passer devant des capteurs qui doivent libérer ses employeurs bloqués dans le garage après que la porte automatique se soit refermée à cause du passage du chien de la famille.
Le chef de famille, M. Arpel est directeur d’une entreprise de fabrication de tuyaux en plastique, la Plastac. Le site de fabrication qui se trouve visiblement dans l’une de ces nouvelles zones industrielles de la périphérie, produit 40 000 m de tube par mois, une production en continu, matérialisée par un long serpent que portent sur l’épaule les ouvriers qui déambulent dans les couloirs ou à l’extérieur des bâtiments.
Le couple vit dans l’illusion du bonheur ostentatoire, exhibant sa richesse et ses nouvelles acquisitions à son voisinage, ses relations professionnelles ou à sa famille et ne comprenant pas que M. Hulot se complaise dans une vie faite de bonheurs simples et authentiques qui ravissent son neveu, ce qui pourrait devenir subversif. Ils tentent donc de le faire embaucher au sein de la Plastac comme opérateur de fabrication. Ce sera un échec puisque le grand échalas ne réussira pas à s’adapter aux exigences de la chaîne de production, adoptant au passage des attitudes et un comportement proches de ceux de Charlie Chaplin dans « Les Temps modernes », un film que nous ne tarderons pas à traiter dans ce même blog.
L’intégration du nouveau salarié passe par le service du personnel, dont le chef, M. Walter, lui expose les horaires de travail : de 8 h à 12 h et de 13 h à 18 h, l’heure de pause étant réservée au déjeuner. Le jour de repos est le dimanche, ce qui nous rappelle qu’à cette période, on travaillait aussi le samedi.
La matière première est constituée de différents objets en plastique, destinés au rebut, ce qui peut paraître surprenant pour un temps où les préoccupations environnementales étaient totalement étrangères. Ces déchets sont curieusement livrés par une charrette attelée à un cheval, concession faite à cette modernité ; c’est d’ailleurs par ce moyen de locomotion que M. Hulot quittera la fabrique accompagné de son jeune neveu, l’équipage emportant également une partie des « produits non conformes » générés par la négligence de cet oncle décidément inapte à intégrer cette société de la fin du 20ème siècle. En effet, chargé de surveiller un processus de fabrication, il finira par somnoler, bercé, il est vrai par le jet continu de vapeur continu d’une tuyauterie. La machine se dérègle, elle est prise de hoquets, au lieu du long et lisse boudin de caoutchouc, elle vomit un tube ponctué de turgescences, régulières au début tel un chapelet de saucisses, puis totalement difformes ensuite, malgré ou à cause de l’intervention de notre sympathique ouvrier. Un de ses collègues, portant comme la plupart des lunettes noires, un masque et des gants, est pris d’un fou rire, tandis que Pichard, vêtu d’une blouse blanche et que l’on pourrait apparenter à un directeur de production, se désespère et s’efforce de cacher le désastre à un client à qui le directeur est en train de faire visiter l’usine.

L’expérience ne durera donc pas plus d’une journée. De cette entreprise moderne, nous pourrons noter qu’elle est organisée selon le
Taylorisme
, avec un management très structuré que l’on retrouve dans l’organisation. Le directeur bénéficie par exemple de a propre place de parking. La Plastac dispose aussi d’un pool de secrétaire-dactylographes devant lequel M. Hulot passe alors  qu’il va rejoindre son poste de travail. Incorrigible, il ne manquera pas de jouer avec le chien du directeur, son beau-frère. C’est qu’à l’époque, il n’était pas rare de voir les dirigeants venir au bureau accompagnés de leur animal de  compagnie.



dimanche 27 décembre 2015

Le recyclage d’appareils électroniques dans un ESAT dans le film "Superstar" de Xavier Giannoli (2012)

"Superstar" pourrait faire l'objet d'une étude sur les conditions de travail dans le monde impitoyable de la télévision et plus encore sur les relations interpersonnelles épouvantables et la manipulation dont sont victimes ou coupables les producteurs et les divas du  petit écran et leurs collaborateurs. Le sujet, improbable mais interpellant, est celui de Martin Kazinski, un anonyme qui, à cause des réseaux sociaux, est projeté sur le devant de la scène, sans que l'on sache pourquoi et comment cette célébrité involontaire ait commencé. La réflexion proposée par le réalisateur réside dans la puissance et la dangerosité des nouveaux médias, et leur capacité à fabriquer des stars totalement artificielles et éphémères.
C'est sous l'angle de l'entreprise industrielle que nous l'évoquerons, même si cette partie est la plus réduite dans ce film de Xavier Giannoli de 2012. Au tout début, avant de devenir « l'homme qui ne voulait pas être célèbre », Martin est ouvrier dans une entreprise dont l'activité est de «désosser» des appareils électroniques afin de les recycler. Avec une particularité puisque, sans que l'on sache s'il s'agit d'un E.S.A.T.  (Etablissement et Service d'Aide par le Travail), les salariés sont composés en partie de travailleurs  handicapés, déficients mentaux. Martin est très proche d'eux, plus encore d'un jeune trisomique qui ne traite que la touche «x» des claviers d'ordinateurs, cette proximité permet au réalisateur d'appuyer un peu plus sur la superficialité du monde de la télévision comparé à celui d'une entreprise industrielle, dont les ouvriers sont même improprement qualifiés de «débiles légers» au milieu du film.
Il est à noter que ces salariés portent des tenues très ressemblantes à ceux de Bretagne Ateliers, une entreprise adaptée dont nous avons parlé dans ce blog (Comment Bretagne Ateliers gère ses compétences), et qui semble poursuivre son activités après avoir subi les affres de la crise automobile de ces dernières années.

dimanche 29 novembre 2015

Dans le quotidien de la brigade des stupéfiants dans le film de Bertrand tavernier L.627 (1992)

C’est bien parce qu’il l’a voulu réaliste que ce film de Bertrand Tavernier est remarquable au niveau des conditions de travail. A l’opposé du genre policier typique des films noirs américains et loin du maître français du genre qu’est Jean-PierreMelville, L.627 dépeint le quotidien d’un commissariat de police dont les fonctionnaires essaient tant bien que mal de lutter contre la criminalité, et plus spécifiquement la consommation et le trafic de drogue répréhensibles au titre de l’article de loi qui donne son nom à ce long métrage. Si l’on assiste à des filatures en règle, des interpellations ou des perquisitions, on voit autant les policiers en butte à des problèmes logistiques telles une pénurie de papier carbone que pallie une inspectrice qui en emprunte à sa mère, ou une erreur de livraison de papier à en-tête. Ils doivent aussi faire face à un manque de véhicules, une carence amplifiée par le comportement de syndicalistes qui, pour se rendre à une réunion, réquisitionnent la voiture qui leur était certes initialement affectée, mais qui est utilisée pour une planque. Les officiers de police judiciaire ne semblent pas résignés, ils cherchent cependant à maintenir l’ordre et la loi souvent en proximité avec la racaille, sous prétexte d’utiliser les services de « cousins », les précieux indics élus parmi la faune de prostituées ou de toxicos.
Les lourdeurs administratives n’ont d’égal que l’obsession du chiffre qui se traduit par de pesantes statistiques à fournir à la hiérarchie. Une hiérarchie pas toujours d’une grande probité, puisque le  commissaire principal, par exemple, enchaîne les prestations d’ouvertures de porte en compagnie d’huissiers de justice ou les procédures de pose de scellés sur les cercueils, afin de se faire de l’argent.
C’est donc une fresque fidèle du contexte professionnel d’un commissariat de police que nous propose Bertrand Tavernier, une réussite due à la participation de Michel Alexandre, un ancien policier, à l’écriture du scénario, mais aussi à la justesse de l’interprétation de Didier Bezace dans le rôle de l’ enquêteur de deuxième classe Lucien Marguet dit « Lulu », passionné par son métier.

Pour aller plus loin :
La critique de Telerama
La critique de SensCritique
La présentation du film par son réalisateur :



mercredi 21 octobre 2015

Manipulation psychologique en entreprise dans "Une étrange affaire", un film de Pierre Granier-Deferre (1981)

Bien que dans les 2 cas ce soit l’univers des grands magasins urbains qui serve de support à l’intrigue, ce film de Pierre Granier-Deferre, « Une étrange affaire » se situe aux antipodes de « Riens du tout » de Cédric Klapish, dont nous avons parlé sur ce même blog.
Si la réorganisation traitée dans la fiction du réalisateur alors tout jeune prenait des accents humains, c’est quasiment un drame qui se joue dans la fiction de son aîné. Celui-ci décrit avec une rare acuité, déjà en 1981, les mécanismes de la manipulation psychologique exercée par un patron sur ses salariés en général, et en particulier sur un jeune cadre, Louis Coline, figuré sous les traits de Gérard Lanvin.
Après le décès soudain du directeur de l’enseigne « Les Magasins », un commerce de centre-ville de type « Les Galeries Lafayette », un nouveau dirigeant, Malair (Michel Piccoli) est nommé. Son arrivée suscite un climat anxiogène : on ne donne pas son nom, ce qui laisse planer toutes les inquiétudes. On l’annonce à Bâle, puis à Madrid ou encore à Sarajevo, sa réputation s’accroit, la rumeur enfle, il est même question de « charrettes » … A notre époque et sous réserves de connaitre son identité, les salariés se seraient précipités sur Internet pour « Googliser » le nom du futur patron, mais en 1981 …
Alors qu’on ne l’attend plus, il apparaît. Son comportement est irrationnel, Louis le trouve dans son bureau en train de fouiller dans ses tiroirs ; il en extrait avec curiosité des tickets de  PMU ou de Loto. Le jeune homme se présente, et Malair lui demande de ne pas faire état de cette première rencontre. Mais à l’occasion du tour des services que le directeur ne manque pas d'opérer, il montre clairement qu’il connait déjà Louis. Ce qui ne manquera pas d’inquiéter le chef du service « Publicité » dans lequel travaille le jeune homme. La relation très ambiguë se poursuit, le nouveau dirigeant prend le jeune cadre enthousiaste sous sa coupe, indirectement d’abord, par l’intermédiaire de ses bras droits, Paul, le directeur financier (Jean-FrançoisBalmer) et François (Jean-Pierre Kalfon) qui assure la fonction de chauffeur, homme de confiance et garde du corps. Les 2 collaborateurs les plus proches de Malair, d’une très grande complicité avec lui, s’attribuent le bureau de Louis sur qui le travail de destruction psychologique se poursuit : le boss court-circuite son chef et confie le plan publicité stratégique des « Magasins » à Louis qui finit par se montrer flatté de cette confiance. Le mécanisme de manipulation s’accélère, le patron se montre plus direct, parfois trivial et demande à son jeune collaborateur une disponibilité totale qui confine au harcèlement.

La mine de Louis change, on perçoit chez lui la montée du stress bien qu’il persiste à s’enflammer pour son nouveau statut. Fier de cette proximité avec le patron, un soir, en dehors des heures de service, il emmène Nina (Nathalie Baye), son épouse, visiter le bureau que s’est fait aménager le responsable. Alors que l’on annonce 2 licenciements dont celui d’une salariée victime d’alcoolisme, Malair s’incruste encore plus dans la vie privée de Louis. Il débarque un dimanche matin au bar où le jeune homme joue aux courses en compagnie de l’un de ses amis, et le « kidnappe » sous le prétexte fallacieux de travailler un dossier. La journée s’achèvera par un dîner au cours duquel Louis rencontrera la faune bigarrée que compose la cour de son gourou. Puis Malair débarque ensuite un soir pour dormir chez Louis et Nina au motif que des travaux sont en cours d’achèvement à son domicile, allant sans vergogne jusqu’à s’approprier la chambre du modeste appartement du jeune couple et à s’accaparer la cuisine pour s’y préparer un en-cas.
Cette attitude excessive parait totalement impossible dans la réalité, mais Granier-Deferre y a recours pour analyser avec finesse le processus de manipulation psychologique, en s’appuyant par exemple sur les perceptions et les réactions de Nina, l’épouse de Louis. Malair essaiera d’ailleurs de la séduire, l’invitant elle et son époux pour un dîner durant lequel il annoncera que le chef de Louis « les quitte », puis offrant à la jeune femme une montre. Elle finira par prendre ses distances, expliquant à Louis qu’elle « ne le quitte pas pour quelqu’un d’autre », mais « parce qu’il n’est plus personne ». Toujours méfiante, elle essaiera de l’alerter, qualifiant Malair «d’abstrait, comme  Dieu ».
Après le départ de Nina, Louis se réfugie encore un peu plus dans le travail, et finit par s’installer chez son patron, partageant son intimité avec François, obéissant aux caprices de Malair qui le convoque par exemple dans sa salle de bains alors qu’il est en train de se raser, totalement nu. Le mentor devient de plus en plus autoritaire, il prend son collaborateur pour son larbin, puis un jour, il disparaît sans laisser de traces, au grand désarroi de Louis Coline, totalement désemparé. Ainsi que l’analyse judicieusement Guillemette Odicino dans Télérama, aujourd’hui, « on verrait bien Louis Coline témoigner dans un documentaire sur le burn-out ou le harcèlement en entreprise. Car Louis Coline est comme mort. Frappé de stupeur parce que son patron, son gourou, celui pour lequel il a tout sacrifié l’a abandonné. Fidèle à son poste, il attend qu’il revienne … » Et la journaliste de poursuivre : «  Pourtant, cet employé désinvolte qui végétait au service publicité d’un grand magasin n’avait a priori rien pour se transformer en disciple robotisé. Sauf peut-être un vide à combler, une place à se faire ».
Il y a déjà plus de 30 ans Granier-Deferre anticipait les phénomènes de souffrance au travail avec des comportements symptomatiques de surinvestissement, caractéristiques des « workalcoolics » et le constat d’un manque de reconnaissance qui frappe les salariés, plus particulièrement en France. Peu importe l’entreprise, le réalisateur ne nous montre d’ailleurs pratiquement rien de ces « Magasins » dont on sait seulement que le principal concurrent se dénomme « Les galeries » et dont l’espace de vente sera montré qu’à une seule occasion.

Pour aller plus loin : l'article de Télérama


dimanche 13 septembre 2015

Hard discount et gaspillage alimentaire dans "Discount" un film de Louis-Jean Petit (2015)

S’il existait un César de la meilleure actrice de comédie sociale « à la française », CorinneMasiero devrait sans  conteste aucun, figurer parmi les nominées. Après ses prestations convaincantes dans « Louise Wimmer » et « De rouille et d'Os »,  évoquées dans ce blog. Dans Discount, un film de Louis-Julien Petit, elle occupe à nouveau un rôle central et colle encore une fois parfaitement au personnage. Le point de départ de l’histoire est assez simple : les employés d’un supermarché de type « hard-discount », sur le point d’être licenciés,  mettent en place une organisation afin de détourner les produits dont la DLC (date limite de consommation) est dépassée et  promis à la casse. Avant de les fouler du pied et d’y répandre de l’eau de javel, ils en prélèvent une partie qu’ils revendront à des prix extrêmement compétitifs, et pour cause, dans un magasin parallèle créé de toutes pièces dans la grange de la ferme où habite Christiane (CorinneMasiero). Le trafic débute timidement, mais devant l’intérêt affiché par les clients et les résultats financiers supérieurs à leurs attentes, et surtout la pression exercée par la directrice, interprétée par une excellente Zabou Breitman, la petite bande augmente les volumes.
Même si Louis-Julien Petit ne glisse à aucun instant avec facilité dans la fable, on ne demande qu’à adhérer à l’œuvre de ces Robins des bois modernes qui suscitent un bel engouement mais, la morale est sauve, ils finiront par se faire prendre sans que leur clientèle ne soit inquiétée.
Quant au réalisme des situations professionnelles, la plupart des scènes paraissent plausibles. Les employés remplissent les rayons et compactent les emballages, avant l’arrivée des clients, puis détruisent donc les produits en voie de péremption tandis que les hôtes ou hôtesses de caisse, selon le terme dévolu maintenant aux caissiers et caissières, assurent leur mission. Ils prélèvent parfois des bons de réductions à leur bénéfice, au risque, comme Christiane de se faire sanctionner, tout en  s’efforçant de respecter la cadence imposée par la direction.

Quelques aspects peuvent sembler moins crédibles, tel le comportement de la directrice. Salariée du groupe, elle ambitionne de devenir responsable de réseau. A cet effet, elle suit un cursus de formation au sein de l’enseigne. Elle y apprend par exemple que, quand elle conduit un entretien avec un collaborateur, elle doit toujours se faire assister par une personne qui notera par écrit les termes des échanges. Elle fait donc appel à sa « garde rapprochée », ses agents de sécurité, qui de manière tout aussi surprenante sont aussi chargés de chronométrer le personnel chargé de l’encaissement afin de maintenir la pression sur la productivité. Très curieusement, les vigiles semblent ne jamais se préoccuper des clients comme si la démarque inconnue ne pouvait être que le fait des salariés qu’ils ne manquent pas de fouiller en fin de journée, contre toute attente.

Sur le plan managérial, la manipulation n’est jamais bien loin. La directrice propose à Gilles, un de ses collaborateurs, une évolution professionnelle, alors que certains de ses collègues vont être victimes de suppressions de postes à l’occasion de la mise en place de caisses automatiques.
Le plus étonnant invraisemblable est peut-être cette ruée des clients le premier jour des soldes ; à l’issue du compte à rebours scandé par la directrice, ils se précipitent dans le commerce pour profiter des promotions que les employés du point de vente auront minutieusement préparées. Ils mettront encore plus de soin et de motivation lors de l’installation de leur propre magasin, dans cette ferme perdue dans la campagne : mise en place de la caisse et du merchandising, création des rayons, étiquetage, mise en place de la PLV et de l’ILV, allant jusqu'à proposer des services complémentaires telle la livraison à domicile.

En résumé, Louis-Julien Petit, donne à voir une description assez fidèle de la distribution et spécialement du hard discount, sans tomber dans la caricature, et sans s’appesantir sur l’idée de départ qui est le gâchis induit par la destruction de produits encore propres à la consommation dans le secteur de la grande distribution. Un sujet qui a refait récemment surface dans l’actualité, avec ce texte  de loi pour la lutte contre le gaspillage alimentaire.
Et le César de la meilleure actrice de comédie sociale « à la française » est attribué à …

Pour aller plus loin :


Le festival du film francophone d'Angoulême où Discount a obtenu le Valois du public

La bande annonce :



jeudi 11 juin 2015

Le travail dans les carrières de marbre dans "Fils de personne" de Raffaello Matarazzo (1951)

Bien qu'une grande partie de ce "classique du mélodrame" se déroule dans les parages ou à l'intérieur même des célèbres carrières de marbre de Carrare, il ne nous délivre que peu d'informations sur le dur labeur des carriers au milieu du 2ème siècle.
Quelque scènes, cependant, montrent l'utilisation des explosifs, la découpe puis le transport de la précieuse roche, avec l'omniprésence de risques d'éboulis ou d'accident pendant la manipulation des blocs, à une époque où la mécanisation était très limitée.
A noter la présence au générique de l'actrice française Françoise Rosay.

Pour en savoir plus sur le film : Fils de personne