mardi 15 janvier 2013

Cinéma : Mammuth, pas une retraite de réussie pour Depardieu avant sa retraite de Russie

Avant sa retraite en Russie dont la presse s’est fait largement l’écho, Gérard Depardieu était à l’affiche d’un film qui ne traitait pas du monde du travail, mais de la fin de carrière, et donc du départ à la retraite. Bien que réalisé par les fantasques auteurs de Groland, la mythique émission de Canal +, le sujet de la retraite est abordé dans un premier temps sobrement, bien servi par un Gérard Depardieu dans le rôle de Serge Pilardosse, ouvrier des abattoirs, et Yolande Moreau, qui joue son épouse, elle-même employée de grande surface. Les premières scènes apparaissent très réalistes, les gestes de Pilardosse maniant la scie ou le couteau pour couper la viande sont précis, les situations vécues par son épouse dans le supermarché qui l’emploie sont plausibles, comme par exemple le stress généré par sa peur de « finir » au rayon poissonnerie.
Le départ à la retraite de Pilardosse reste crédible et en rien caricatural, n’était-ce la teneur du cadeau qui lui est remis à cette occasion, un puzzle, et le fait que le bénéficiaire ignore en tout point ce qu’il va percevoir.  Dans la réalité, le salarié demande une situation au regard de la retraite à la CARSAT (ex-CRAM) ce qui détermine son choix de faire valoir ses droits ou pas.
Notre principal protagoniste se retrouve dans une situation compliquée puisque ses anciens employeurs ne l’ont pas tous déclaré et versé les cotisations correspondantes aux caisses de retraite obligatoires ou complémentaires. La quête de ses points de retraite sera l’objet d’un road movie qui l’ emmènera sur la route de son passé au travers de scènes surnaturelles dans lesquelles les réalisateurs, Benoît Delépine et Gustave Kervern laissent libre cours à leur imagination, dans l’esprit des Groland.

mardi 4 décembre 2012

Festival du film de Turin : un prix du film ouvrier et Ken Loach refuse une récompense

Le réalisateur britannique Ken LOACH a refusé le Grand Prix que souhaitait lui décerner le jury du Torino Film Festival, en réaction au traitement réservé au personnel de nettoyage et de gardiennage du Musée du Cinémade Turin, associé à ce festival cinématographique turinois. Les salariés se sont vus obligés de signer de nouveaux contrats de travail, avec une baisse de salaire, suite à la reprise par une société extérieure de leurs prestations. Deux d’entre eux ont été licenciés suite à leurs protestations, ce sont des syndicats qui ont prévenu le maître, lui-même très impliqué dans la défense des travailleurs. Il a par exemple réalisé Bread and roses, qui traitait de la révolte de femmes et d’hommes de ménage mexicains employés à Los Angeles.

Le festival  du film de Turin distingue entre autres une oeuvre à caractère ouvrier ; cette année c'est le film Nadea e sveta de l'italienne Maura DELPERO qui a été primé.

mercredi 21 novembre 2012

"Building" : une pièce de théâtre sur le monde de l'entreprise

Réalisée par Catherine SCHAUB, cette pièce est interprétée entre autres par Leonore CONFINO, qui en est l'auteur. L'histoire se déroule succivement dans chacun des étages  d'un bâtiment de 13 étages, occupés par les services de Consulting Conseil, l'entreprise qui occupe ce building qui donne le titre de ce spectacle. Les jeux de scènes sont vivants, parfois chantés, toujours rythmés de manière à faire ressentir la pénibilité du travail et le stress latent subi par les différents salariés de l'entreprise : hôtesses, comptables, agents d’entretien, cadres, directeurs des ressources humaines, chargés de communication ... Les dialogues et l'interprétation semblent mettre habilement en évidence la déhumanisation provoquée par la pression induite par la recherche permanente d'atteinte des objectifs impulsée par les actionnaires.

Faute d'avoir vu cette pièce qui fut montée début 2012 au Théâtre Mouffetard malheureusement fermé maintenant, et cher à Pierre SANTINI, nous recommandons cette excellente  analyse sur Voilà le travail le blog d'Elsa FAYNER consacré au monde du travail, et dont l'une des catégories se penche plus particulièrement sur le monde du travail dans la Culture. Elsa FAYNER est par ailleurs responsable de Rue89-Eco depuis mars 2012.

Pour voir la bande annonce :

 



"Building" - Théâtre Mouffetard, à Paris - Coproduction Les Productions du Sillon (compagnie en résidence au Théâtre de Poissy), la Fédération d’Associations de Théâtre Populaire, le Théâtre de Poissy, le Théâtre de Saint-Maur, le Théâtre Montansier et Act.
De Leonore CONFINO - Mise en scène Catherine SCHAUB
avec Bruno Cadillon, Léonore Confino, Olivier Faliez, Yann de Monterno, Miren Pradier
création musicale R. Jéricho et Aldo Gilbert – chorégraphies Magali B. – scénographie Sophie Jacob – Lumières Vincent Grisoni et Marc Gingold – costumes Julia Allègr



samedi 10 novembre 2012

Table-ronde/débat "DRH & Cinéma : une profession au banc des accusés ?" à l'IGS le 14 novembre 2012

Le Groupe IGS est une école en management,  gestion des ressources humaines, commerce, marketing ...basée sur le concept d’Université Professionnelle Internationale. Elle dispose d'un CFA qui propose des cursus en apprentissage. Un groupe de 22 apprentis du CFA IGS en Cycle Master Pro 2 « Ressources Humaines » a participé à une étude menée depuis un an sur la vision du rôle du DRH, le Directeur des Ressources Humaines, qu'offre le cinéma.

Les résultats de ces travaux seront présentés le 14 novembre prochain au cinéma "L'Archipel", 17 Boulevard de Strasbourg - Paris 10 ème, sous forme d'un court-métrage, suivi d'un débat auquel participeront entre autres le romancier et réalisateur Gérard Mordillat dont nous parlerons prochainement dans ce blog au sujet du téléfilm "Les vivants et les morts" et le journaliste David ABIKER. Ce dernier a d'ailleurs vanté sur son blog la qualité de nos publications à partir desquelles il se soit semble-t-il documenté pour préparer son intervention. Un honneur qui nous est fait tant nous apprécions la passion, l'esprit et la  truculence de ce chroniqueur.

Pour s'inscrire, il suffit de cliquer sur ce lien.

dimanche 21 octobre 2012

Les états d’âme d’un cadre commercial des années 50 dans "La modification" de Michel BUTOR


Dans ce roman de 1957 écrit par Michel BUTOR pour lequel il obtint le prix Renaudot, la profession du principal protagoniste n’est qu’un prétexte. Celui de voyages réguliers entre Paris et Rome où se trouve le siège de la Scabelli, la firme de machines à écrire dont notre personnage est le responsable commercial pour l’hexagone. L’ensemble du récit qui se déroule dans le train lors d’un voyage entre les 2 capitales sera l’objet d’une longue réflexion sur l’issue d’une relation que Léon Delmont entretient avec Cécile, une jeune italienne. Partant de la gare de Lyon avec la ferme intention de lui annoncer qu’il “l’installera” à Paris pour vivre avec elle, abandonnant femme et enfants, le voyage jusqu’à Stazione Termini l’amènera  à modifier ses desseins comme l’indique le titre de ce livre.
Sur son métier nous n’apprendrons que peu de choses, si ce n’est qu’il rencontre des clients à l’occasion de repas d’affaires et qu’il visite ses commerciaux disséminés sur le territoire français. Ce que l’on peut noter toutefois, ce sont ses états d’esprit, à l’occasion de rares passages, comme par exemple page 145 (editions de Minuit Coll. “Double” 1980) :
“... parce que chaque fois plus amère encore la différence s’affirmait entre cette vie plus libre et plus heureuse dont l’air romain vous avait donné l’espérance, et l’oppression, la charge parisienne sous laquelle elle s’enfonçait, parce que chaque fois vous lui apparaissiez vous trahir un peu plus vous même à Paris dans cette occupation de plus en plus fructueuse finacièrement, encore que celà ne dapassa point, certes des limites fort contraignantes et dont vous vous efforciez de plus en plus de vous cacher l’absurdité, abandonnant à chaque fois, à chaque relation commerciale que vous invitiez à dîner, un peu plus de votre fierté et de votre sens ancien, prenant peu à peu leurs rires bas, leurs lieux communs moraux ou immoraux, leurs expressions pour désigner les employés, les concurrents, la clientèle, vous avilissant, vous aplatissant devant ce système qu’autrefois vous ne faisiez au moins que pactiser, dont vous pouviez vous détacher au moins en paroles, et puis pendant un certain temps, au moins dans vos paroles avec elle (Henriette, son épouse), vous y livrant maintenant un peu plus aveuglément chaque fois en prétendant toujours que c’atait à cause d’elle, que c’était pour qu’elle pût être mieux installée, avoir ce bel appartement, pour que les enfants fussent mieux habillés, pour qu’elle neût rien à vous reprocher comme lui disiez autrefois, avec ironie au début, vous éloignant de plus en plus de vous et d’elle.”
Plus loin, Léon semble reconnaître sa jeunesse en la personne d’un passager du train qu’il appelle Pierre, et qui voyage amoureusement avec une jeune femme que notre cadre commercial baptise Agnès. C’est en adoptant ce parallèle et avec une réflexion sur le temps qui passe et le sens de la vie qu’il exprime à nouveaux ses états d’âmes (page 192, même édition) :

« Dans dix ans que restera-t-il de vous, de cette entente, de cette joie qui nie la fatigue, qui en fait une délicieuse liqueur que vous commencez déjà à savourer. Qu’en restera-t-il lorsque les enfants seront venus, lorsque vous Pierre, vous aurez avancé dans votre carrière peut-être aussi stupide que la mienne ou pire, lorsque vous aurez sous vos ordres quantités d’employés que vous paierez trop peu parce qu’il faudra bien que la boîte marche et que, vous, ce n’est pas la même chose, lorsque vous aurez cet appartement dont vous rêvez, quinze place du Panthéon. »
Au passage, on aura pu relever, déjà à l’époque, l’emploi avec un sens péjoratif de l’expression « boîte » pour désigner l’entreprise.

dimanche 30 septembre 2012

Marie-Line un film de Mehdi Charef : Muriel Robin chef d'équipe dans le nettoyage industriel


Ce n'est pas un rôle comique qu'interprète Muriel Robin dans Marie-Line, mais bien un personnage dur, confronté à des "injonctions contradictoires", comme on dirait dans le monde réel du  travail. car au fond, Marie-Line n'est pas si méchante, et même humaine, elle le montrera dans quelque occasion. Mais pour avoir un emploi de chef d'équipe dans un équipe chargée du nettoyage d'un supermarché la nuit, elle doit jongler avec les compromis mais aussi faire face aux injonctions contradictoires comme on les rencontre dans le monde réel du travail. Prendre une carte du Front National, par exemple,  pour satisfaire ses employeurs, et en conséquence se faire traiter de raciste, rudoyer ses collègues d'origine étrangère en situation irrégulière, toujours sous la menace d'une descente de police. Et en tant que chef d'équipe, s'assurer que le travail est fait correctement, assumant ici la fonction de "petit chef", pris entre le marteau et l'enclume, tel que le définit Maurice Thévenet dans son livre "Quand les petits chefs deviendront grands".
Le film de Mehdi Charef n'est pas sans rappeler Bread and roses de Ken Loach, déjà traité sur ce blog (voir cet article). Les deux fictions traitent des problèmes de travailleurs immigrés en situation régulière, dans un secteur d'activités identique, le domaine du nettoyage, mais l'oeuvre du maître britannique se veut plus politique, voire militante.


samedi 25 août 2012

"Un homme jetable" de Aude Walker obtient le prix du Roman social


C'est en juin dernier que l'AFPA (Association pour la formation Professionnelle remettait son 1er prix du roman social. Une distinction qui honore "Un homme jetable" (Editions du moteur) oeuvre d'une jeune auteur, Aude Walker, 31 ans. Son livre raconte le parcours d'une jeune homme de 20ans qui sillonne la France pour réaliser des missions d'interim au sein de différentes centrales nucléaires. La coprésidente du Jury, Joy Sorman, romancière, a salué le "travail romanesque" de l'écrivain, tout en soulignant que te texte "donne à voir une réalité sociale assez méconnue: le travail dans une centrale nucléaire". De son côté Aude Walker a apprécié cette récompense qui pour elle, constitue "un magnifique écho à la volonté de casser ce réflexe très français, qui consiste à ne pas laisser le roman et la littérature se mêler de la société".
Le comité de lecture de ce tout nouveau prix littéraire était composé d'une centaine de professionnels de la formation et de personnes en formation à l'AFPA, dont le directeur, Philippe CAÏLA estime que cet organisme "est légitime à susciter un prix sur le roman social".

Sept ouvrages récents ont été soumis au jury coprésidé par Claude Alphandéry, président d'honneur du Laboratoire de l'Economie Sociale et Solidaire, et Martin Hirsch, président de l'Agence du Service Civique.
Toutes les informations concernant ce Prix du roman social sont disponibles sur le site prixduromansocial.com.
 


mardi 17 juillet 2012

Le travail dans la chanson française, quelques morceaux choisis


Dans la chanson d’expression française, le travail est plus une source de lamentation que de satisfaction. Dans une chanson popularisée par Julien Clerc ou reprise entre autres par Alpha Blondy, le chanteur cajun ZacharyRichard préfère adopter une vie de bohème car « Travailler c’est trop dur et voler c’est pas beau ».  Plus récemment, le groupe Pink Martini nous avouait «  je ne veux pas travailler … », un titre écrit à partir du texte « Hôtel » de Guillaume Apollinaire, ce qui peut expliquer le côté « rétro » de l’interprétation. Dans un registre plus populaire, Henri Salvador nous enseigne ironiquement en 1965, que « le travail c’est la santé » mais que « ne rien faire, la conserver ». Si la chanson n’est pas d’une grande portée philosophique, elle aborde cependant la question de l’intérêt de sacrifier une vie entière au labeur pour finalement ne pas en profiter, et fustige aussi le stress des hommes d’affaires. Dans une approche similaire, Gérard Rinaldi, récemment disparu, compose en 1971 avec Luis Rego le fameux « Merci patron » interprété par leur célèbre groupe Les Charlots. Cette fois, les ouvriers remercient leur employeur de leur permettre de souffrir, ils s’avouent honteux de lui prendre de l’argent en contrepartie, et vont même jusqu’à lui proposer d’inverser leurs rôles.
Enfin, et si la relation au travail est moins flagrante, on pourra noter le « Poil dans la main, payé à rien foutre » de Jacques Higelin qui dans ce texte encourage au farniente plus qu’à s’élever contre le travail en lui-même.
Quelques extraits :
Travailler c’est trop dur (interprétée par Zachary Richard)


Zachary Richard - Travailler c'est trop dur par RollingPat

Merci patron (Les charlots)

Les Charlots - Merci patron par Salut-les-copains



Le travail dans la chanson avec La Cité des Sciences et le Hall de la Chanson


L'origine ou la raison ne sont pas clairement identifiés, mais la Cité des Sciences et Le Hall de la chanson se sont associés pour proposer une page contenant, selon leurs termes "un florilège d'oeuvres musicales évoquant les liens entre chansons et travail". Une sélection intéressante à retrouver à cette adresse.

dimanche 10 juin 2012

Bread and Roses : Ken Loach retrace la lutte de travailleurs clandestins aux USA

Nul besoin de présenter Ken Loach, le cinéaste britannique, auteur de plusieurs films à connotation sociale. "Bread an roses" (Du pain et des roses) présente la particularité de se situer non pas en Angleterre, mais à Los Angeles. L'histoire se déroule dans les années 90 et raconte la lutte que mène des agents de nettoyage de grands buildings pour faire reconnaître leurs droits. C'est avant tout de la dignité que réclament ces travailleurs immigrés, des femmes essentiellement, qui faute d'une situation régulière doivent supporter tous types de brimades. Un jeune syndicaliste maladroit sera le catalyseur d'un mouvement social qui contribuera à améliorer les conditions de travail de ces esclaves d'un nouveau genre. "Bread an roses", inspiré d'une histoire vraie, emprunte son titre à un slogan d'un mouvement ouvrier dont le nom est tiré du titre d'un poème de James Oppenheim (1911).