mardi 24 février 2015

Des horaires de travail excessifs chez EDF ... dans la publicité (Campagne EDF : la saga ElectRIC, épisode 5 avec Eric JUDOR ) ?

La publicité peut tout se permettre. Sans être mensongère, elle occulte parfois certains aspects du produit ou du service dont elle vante les bienfaits ou amplifie jusqu'à l'excès ses bénéfices. Et parfois, elle semble faire fi du respect des conditions de travail, comme dans ce 5ème épisode de cette saga plutôt réussie pour EDF, dans laquelle nous retrouvons Eric Judor, le "Eric" de "Eric et Ramzy".
Dans le cadre d'un jeu dans lequel les participants doivent se faire deviner mutuellement des mots par association d'idées, Eric se permet d'appeler au téléphone son conseiller EDFà une heure tardive de la journée, afin de vérifier que la compagnie nationale ne distribue pas de gaz, contrairement à ce que prétendent ses amis. Afin de ne pas perdre le jeu et la face, Eric Judor mentira sur la réponse de son interlocuteur.
Au mécontentement visible de sa compagne qui est en train de se démaquiller avant d'aller se coucher, le salarié du distributeur d'énergie est déjà au lit, prêt à s'endormir, quand il répond au téléphone, ce qui constitue certes une garantie de service pour son client. Et c'est peut-être le message subliminal de ce spot : oui, EDF fournit du gaz, et votre conseiller est disponible à toute heure du jour et de la nuit. On peut dès lors s'étonner que les salariés de l'enseigne ou les syndicats n'aient pas réagi, pour s'indigner que le personnel soit ainsi "taillable et corvéable" à merci. Mais tout est dans la nuance ... car si l'on écoute avec attention le conseiller répondre à son client au téléphone, il s'étonne  que celui-ci ait son numéro et finit la communication en lui demandant : "Et comment ..." . Sans pouvoir terminer sa phrase puisque son client a déjà raccroché.
Ce n'est donc pas lui qui lui a communiqué son numéro, mais Eric qui l'aurait obtenu par une voie détournée. Il n'a donc aucune obligation d'être disponible pour ses clients à toute heure de la journée, et EDF ne peut en être tenue pour responsable. Tout ce que l'on pourrait lui reprocher et qui se confirme dans chacun des 5 premiers épisodes de la saga,c'est que ses clients sont des filous, d'une très mauvaise éducation ... 
Espérons que le  vieil adage qui dit que, "on a les clients que l'on mérite ..." ne se vérifie pas !


mardi 17 février 2015

Adriano Celentano à la tête d’un mouvement social dans « Rosso bianco e …» un film d’Alberto Lattuada (1972)


Dans ce film d’Alberto Lattuada de 1972, sorti en France sous un titre peu évocateur, voire trompeur (Une bonne planque), Adriano Celentano endosse les habits d’un drôle de patient atteint d’une infirmité de la jambe, Annibale Pezzi, qui occupe depuis 2 ans un des lits de l’hôpital de la ville, avec la complicité du Maire, grâce à son appartenance au Parti Communiste. Il y fait régner sa loi, s’introduit partout, jusque dans la salle d’opération, et ne quittera l’établissement  que sous la contrainte de Germana, la nouvelle mère supérieure magnifiquement interprétée par Sophia Loren. Chassé de son refuge, Annibale deviendra infirmier de campagne, grâce aux connaissances acquises pendant ses années « d’études » au sein des différents services de l’hôpital, puis prendra la tête d’un mouvement social organisé par les ouvriers de la Polovo, une unité de conditionnement d’œufs.
Cet engagement lui sera fatal, il sera renversé par une automobile occupée par quatre brigands qui viennent de dévaliser la banque locale et qui tentent de forcer le barrage mis en place par les manifestants, non sans avoir roulé sur les boîtes d’œufs disposés par les ouvriers, dans une scène allégorique.
Outre la conduite de ce mouvement prolétaire qui survient à la fin du film, Annibale aura eu précédemment l’occasion de s’exprimer sur les conditions de travail. Lors de l’arrivée à l’hôpital d’un ouvrier qui a eu le bras sectionné par un massicot, scandalisé, il déclarera « qu’il ne faut pas utiliser les équipements de sécurité, qu’il n’y a pas d’enfants dans les usines », reprenant ainsi une litanie populaire qui, comme par défiance à l’autorité, laisse entendre que ce sont justement ces dispositifs de sécurité qui provoquent les accidents.

Un point de vue aux antipodes du combat du médiatique chanteur et acteur italien pour l’amélioration des conditions de travail et la lutte contre les accidents du travail, le « morti bianche », un sujet notamment traité dans son film « Yuppi Du » traité dans ce blog.



dimanche 15 février 2015

Les conséquences humaines des fusions d’entreprises dans le livre de Sandro Veronesi « Chaos calme » (2005)

#01 L’impact des fusions d’entreprises sur les organisations et les salariés

Une fois de plus, l’entreprise n’est pas le cadre de l’intrigue de ce roman italien qui a remporté le prix Strega en 2006 et qui a ensuite été porté à l’écran par Antonello Grimaldi, avec dans le rôle-titre, l’un des acteurs transalpins les plus réputés, Nanni Moretti.  Ce serait même plutôt le contraire puisque, justement, le personnage principal délaisse son emploi de cadre supérieur au sein d’une multinationale sur le point d’imploser sous le coup d’une fusion, et décide que "son travail sera de ne plus travailler". En effet, le quadragénaire qui vient de perdre son épouse, accompagne sa fille Claudia le jour de la rentrée scolaire, et décide à l’improviste, de rester  à l’attendre toute la journée dans son véhicule, devant l’école.
Le lendemain et les jours suivants, il recommence. Ses collègues viennent successivement lui  rendre visite dans ce bureau improvisé, sa grosse « Audi A6 3000 » stationnée chaque matin devant l’école que fréquente sa fille. Un jour c’est Enoch, le chef du service du personnel qui vient s’épancher auprès de Pietro sur la fusion en cours. Il lui remet les 3 feuillets qu’il a dactylographiés le matin même à 5 heures du matin, et dans lesquels il a mis « tout ce qu’il avait sur le cœur » (Cf ci-dessous paragraphe #02).
Au travers du point de vue de ce DRH, curieusement affublé du titre de « Chef du service du personnel », Sandro Veronesi dresse une analyse remarquable, il synthétise très précisément les conséquences structurelles et humaines des fusions d’entreprises. Sans militantisme aucun, il met en exergue la valeur du capital humain de l’entreprise et sa capacité à générer de la valeur. Il décrit avec une acuité quasi-scientifique les répercussions sur les salariés de ces regroupements de multinationales ainsi que les pathologies qu’ils risquent de développer par une somatisation de leur stress et de leur mal-être. Il s’attache aussi à relever les conséquences humaines sur les organisations, avec une disparition de la culture d’entreprise et de la confiance, et sur le plan sociologique, une perte du plaisir de travailler en équipe avec ses collègues qui deviennent de véritables rivaux. Et de conclure par le constat d’une perte de compétences de l’entreprise et de l’échec irrémédiable de ces méga-fusions.
Situées au 1er tiers de ce livre, cette approche d’un des aspects des conditions de travail n’y occupe qu’un plan secondaire, et pourrait même sembler incongrue par rapport à l’intrigue. Le travail extrêmement documenté de l’auteur, étrangement renforcé par la mise en gras des termes ou idées importants, en insuffle toute la valeur.


#02 L’analyse du chef du service du personnel
Les 3 feuillets remis par Enoch à Pietro commencent par sa définition des fusions :
« Qu’est-ce qu’une fusion ? Une fusion est le conflit de deux systèmes de pouvoir qui en crée un troisième pour des finalités financières. Elle est conçue pour générer de la valeur, mais la génération de valeur est un concept bon pour les actionnaires, ou pour les banques d’affaires, pas pour les êtres humains employés dans les entreprises, pour qui au contraire la fusion est le plus violent traumatisme qu’on puisse leur infliger au travail. Une fois qu’on a  trouvé l’accord sur la transaction, ce qui n’est pas facile, on a tendance à croire que le plus gros est fait. Cette conviction découle de la sous-estimation que le monde de l’économie réserve au facteur humain et, plus généralement, à la psychologie. Mais c’est une erreur. Les principaux problèmes dans une fusion ne sont pas liés au document qui la sanctionne. »
La lecture de la note écrite en Arial reprend : « Avant les chiffres, en effet, une entreprise est faite par les hommes qui y travaillent, c’est-à-dire par ses salariés, et après l’annonce d’une fusion la réaction de tout salarié à tout niveau est l’incertitude. A qui dois-je me fier ? Qu’est-ce qui m’attend ? Va-t-on me garder ou me renvoyer à la maison ? Mes fonctions vont-elles changer ? Comment mes problèmes seront-ils résolus ? Réussirai-je à garder les privilèges que j’avais conquis ? Aucun ne se soucie de génération de valeur tant que la nouvelle organisation n’aura pas répondu à ces questions, en lui garantissant une nouvelle légitimité. Pendant une fusion, il faudrait parler avec les salariés, les informer et les tenir au courant le plus souvent possible ; le salarié a besoin de confiance, de sentir qu’on ne le considère pas seulement comme un pion ; on lui réserve en revanche un discours-standard, pondu une fois pour toutes par quelques conseillers en communication interne, qui a pour tout effet d’augmenter ses inquiétudes. Ces déclarations aseptisées sur de futures synergies qui ne touchent pas le personnel sont pure hypocrisie puisque tout le monde sait que la seule garantie concrète pour générer de la valeur sur les marchés est une réduction des coûts de l’entreprise, et les réductions de coûts sont réalisées à  80 % par des compressions de personnel. »
Pietro passe alors à la deuxième page : « Ainsi les salariés pendant une période de fusion entrent ils dans une zone de constantes turbulences. Il s’agit d’une période assez critique qui peut durer très longtemps et pendant laquelle le sentiment dominant est l’angoisse. Une angoisse qui, si on la néglige, d’individuelle peut devenir collective ou même se transformer en panique ; l’expérience au contact avec le personnel pendant une fusion enseigne que l’impact est double. Au plan physique, la machine humaine tend à sentir davantage de stress et de fatigue et à accentuer toutes les propensions naturelles à la somatisation, avec une augmentation sensible des allergies, troubles respiratoires, cystites, migraines, dermatites, et, chez les femmes, candidoses, aminorrhées (sic) et dysminorrhées (sic) ; tandis qu’an plan psychologique, les esprits sont envahis par l’incertitude, tout événement suscite des émotions anxiogènes telles que la peur, l’angoisse, le découragement et la frustration qui, à leur tour produisent de graves symptômes de dépression, d’autant plus graves que les personnes concernées sont instinctivement poussées à les refouler car elles appartiennent à une culture de pure performance, où l’existence de ce genre de troubles est tout simplement inconcevable. »

Après avoir fait remarquer à Enoch son erreur sur l’orthographe de « aménorrhées » et « dysménorrhées » que celui-ci s’empresse de corriger, Pietro reprend le fil de sa lecture :
« Cet impact est plus dévastateur pour la tranche d’âge entre quarante et cinquante ans, quand le potentiel d’adaptation est inférieur et que le risque de perdre au change est beaucoup plus élevé. On a l’impression de régresser, on perçoit un sentiment d’injustice. Le traumatisme à absorber est énorme : on était attaché à une culture d’entreprise, à une équipe, à des collègues avec qui on travaillait avec plaisir, dans un esprit de corps. Quand on se retrouve en face des autres, c’est dur. Même s’il est précisé d’entrée de jeu que ce sont eux les « victimes », il s’agit bien de l’ennemi qui se matérialise. Hier encore, on était en rude compétition avec eux, soudain, les voici qui pénètrent notre environnement. On se sent envahi, ne serait-ce que physiquement et on ressent le désir de les envoyer balader, de leur dire qu’on s’en sortait très bien sans eux. Et au contraire, il faut travailler ensemble, et le choc est grand ; on a vu des cadres provenant d’entreprises classiques, où les titres et la hiérarchie sont sacrés na pas réussir à supporter de participer à des groupes de travail avec du personnel provenant de l’autre entreprise, de rang hiérarchique nettement inférieur, au nom d’une compétence commune contingente. »

Arrivé à la fin de cette deuxième page, Pietro se demande si Enoch ne cherche pas finalement à le mettre mal à l’aise en lui soumettant ce texte, pour lui rappeler qu’il peut lui aussi devenir chômeur, lui, Pietro, déjà affaibli par le récent deuil. Il enchaîne avec la lecture  du dernier feuillet :
«  C’est une situation très déstabilisante, et seulement trois catégories de personnes réussissent à le supporter : les fidèles des fidèles, ceux qui tournent leur veste et les collabos. Tous les autres risquent de sombrer. Il faut développer une grande résistance, physique et psychologique, pour ne pas s’écrouler et rares sont ceux qui y parviennent sans une assistance appropriée. Mais une telle assistance n’existe pas. Alors, la conséquence la plus courante est que pendant les fusions, un grand nombre d’excellents éléments quittent volontairement leurs fonctions, avant même que la fusion soit achevée ; ce qui à courte vue, est reçu positivement car l’étape suivante de la compression de personnel est allégée d’autant, alors que cela représente au contraire une perte sèche. Car les hommes et les femmes qui partent emportent avec eux leur savoir et leurs capacités techniques et en comparaison de la valeur virtuelle créée sur les marchés, le résultat réel est un terrible appauvrissement. Voilà pourquoi on n’a encore jamais vu de grande fusion ne pas échouer nom de Dieu, au bout d’un an ou deux. »

Caos calmo (Edition originale - Bompiani) – Sandro Veronesi.

Chaos calme (Edition française - Bernard Grasset) – Sandro Veronesi - Traduction de Dominique Vittoz avec le concours du Centre National du Livre.




mercredi 28 janvier 2015

Sandrine KIBERLAIN en employée de restauration collective dans le film "L'oiseau" (2012)

Dans ce film de 2012 réalisé par Yves Caumon, l'oiseau c'est un peu elle, Sandrine Kiberlain, séparée de son mari, en détresse et quête de sens pour sa nouvelle vie. L'oiseau, c'est un peu aussi son fils, décédé quelques années plus tôt, un événement dont elle se remet avec difficulté; Et c'est surtout le volatile emmuré dans un ancien conduit de cheminée, qu'elle sauvera d'une mort certaine en perçant un trou dans le mur de son appartement. Mais en lui redonnant la liberté, elle le précipitera vers une triste fin sans que l'on puisse en déduire un parallèle avec la tragique disparition de son enfant.
Est-ce dans ce besoin de se reconstruire qu'elle occupe cet emploi dans les cuisines d'un hôpital pour lequel elle ne semble pas expérimentée ? Elle ne parait pas totalement intégrée, les relations entre collègues n'étant au début des plus chaleureuses. Du moins au début, car elles parviennent tout de même à se souhaiter un "bon weekend" un peu plus en avant du film.
Ces cuisines pourraient être celles de n'importe quelle collectivité, puisqu'il n'est jamais question des clients, si l'on n'y préparait du magret à l'orange. Les conditions de travail sont assez réalistes, avec des scènes pendant lesquelles les protagonistes commandent des marchandises ou les sortent des chambres froides où parfois la lumière s'éteint. Les règles de sécurité alimentaire (H.A.C.C.P.) semblent respectées, sauf peut-être pendant les phases de nettoyage.
Le comportement le plus insupportable est celui du responsable ou celui qui semble l'être, qui passe son temps à harceler ses collègues féminines pour obtenir leurs faveurs. Il arrive parfois à ses fins, Anne (Sandrine Kiberlain) l'apercevra de loin en train de consommer son "droit de cuissage" avec l'une des salariées assise sur un plan de travail.
Un comportement qui ne repoussera pas Anne qui, en conclusion de cette fiction, finira par le rejoindre  dans un restaurant qu'il aura repris entre-temps sur le littoral.

Plus d'information sur :
- le film : L'oiseau.
- Sandrine Kiberlain sur ce même blog dans "Mademoiselle Chambon"


lundi 29 décembre 2014

Vidéo-surveillance dans la grande distribution : "La caissière du super", une chanson d'Arthur H (2014)

C'est le même sujet que dans le précédent article "Video-Surveillance dans la grande distribution", mais cette fois c'est Arthur H dans sa chanson sortie en septembre dernier, "La caissière du super" qui nous interpelle. Pratiquement rien sur les pratiques professionnelles de l'hôtesse de caisse comme il est bienséant de les nommer, mais quelques éléments sur sa motivation : si elle travaille c'est pour "les beaux yeux de son gosse", pour "son gosse", "pour la banque, pour les beaux yeux de la banque", ou "pour la bouffe, pour la bouffe de son gosse" . Quant aux conditions de travail, nous apprenons que "la caissière du super" est surveillée, que "les cameras ne se lassent pas
d'enregistrer les petits travers de la caissière du super", que les "petits chefs ne se lassent pas de critiquer les petits travers de la caissière du super".

Le texte intégral de la chanson peut être consulté sur ce site.

dimanche 28 décembre 2014

La vidéo-surveillance dans la grande distribution : "De rouille et d'Os" de Jacques Audiard (2012)

La vidéo-surveillance semble constituer un sujet prégnant dans le monde de la distribution, qu'elle soit alimentaire (G.D.A.) ou spécialisée (G.S.S.). Nous avions pu en juger dans le cinéma ou à la télévision avec des films comme Gigante ou Surveillance dans lesquels la trame se déroule essentiellement dans la surface de vente. Une nouvelle preuve à verser au dossier nous est donnée dans le film de Jacques AUDIARD, "De rouille et d'os" en compétition officielle au Festival de cannes 2012, et interprété entre autres par Marion COTILLARD et Matthias SCHOENAERTS. Ce dernier joue le rôle d'Ali, un jeune marginal qui débarque avec son fils sur la Côte d'Azur  pour rejoindre sa sœur, caissière dans un supermarché. Entre deux combats à mains nues sans aucune règle organisés sur un terrain vague par un bookmaker véreux, il assurera des missions de surveillance dans des entreprises pour ce même commanditaire interprété par Bouli LANNERS. Peu scrupuleux, celui-ci demandera à Ali de "planquer" des caméras dans un magasin, celui même où sa sœur travaille et qui en fera les frais puisque son patron s'apercevra par ce moyen qu'elle récupère des produits dont les dates limites de consommations (D.L.C.) sont périmées.
Il est à noter que c'est l'excellente Corinne MASIERO, déjà très remarquée dans Louise WIMMER qui assure le rôle d'Anna, la sœur d'Ali et que sur le plan des conditions de travail, le film débute sur un accident  du travail puisque Stéphanie (Marion COTILLARD) dresseuse d'orques au parc aquatique d'Antibes se voit amputer les deux jambes suite à un choc violent avec un des mammifères. Un accident du travail atypique et que l'on espère fort rare.

dimanche 30 novembre 2014

Une hôtesse de l'air dans les années 60 : Catherine DORLEAC dans "la Peau douce" de Truffaut (1964)


A l'occasion de l'anniversaire de la disparition de François TRUFFAUT, Arte a proposé une large diffusion des œuvres du cinéaste, dont "La peau douce", une dramatique qui raconte la relation adultère entre un écrivain à succès (Jean DESAILLY) et une hôtesse de l'air, magnifiquement interprétée par une Françoise DORLEAC sublimée par le maître français. Le film, qui s'achève tragiquement, nous donne à voir le métier d'hôtesse de l'air à l'époque des vols en Caravelle où les voyages en avion étaient réservés à une élite.
Le personnel de bord assurait alors le service de restauration, mais sans les contraintes commerciales que connaissent les stewards et hôtesses de nos compagnies low-cost, devenus de véritables agents commerciaux, priés de développer le chiffre d'affaires en proposant, sandwiches, boissons, parfums, cigarettes ou tickets de bus, après s'être acquittés de la corvée du remplissage des coffres à bagages,  encombrés par les volumineux bagages à main de passagers de plus en plus pressés et de moins en moins respectueux.
En 1964, l'hôtesse de l'air bénéficie encore du prestige lié à la fonction : belles et élégantes dans toute situation, elles parcourent le monde et goûtent le charme de palaces pendant les escales, tuant le temps en compagnie des pilotes ou copilotes, ou en s'adonnant au shopping dans diverses capitales de la planète. Les conditions de travail sont plutôt supportables, n'était-ce la tabagie ambiante qui affecte les habitacles des avions, et faute de coffres à bagages au dessus des sièges, pas de risque de lumbago en manipulant une valise ou un sac de voyage.
Elles doivent cependant maintenir leur condition physique, Nicole CHOMETTE (Catherine DORLEAC) fréquente d'ailleurs une salle de sports afin de préparer le recyclage.de sa formation  de secourisme.
Le plus marquant est sans conteste la brièveté de la carrière de ces jeunes femmes  : Nicole explique à Pierre LACHENAY, cet auteur spécialiste de Balzac, qu'après 2 ou 3 ans d'activités les hôtesses de l'air se marient et abandonnent leur profession.

Sources : le site de TELERAMA et le site d'ARTE


samedi 30 août 2014

Précarité dans le nettoyage : "Louise Wimmer", un film de Cyril Mennegun

Le secteur du ménage ou du nettoyage se prête décidément et malheureusement bien à la précarité. Plusieurs films cités dans ce blog déroulent leur trame dans ce domaine d’activité
Pour Louise Wimmer, le travail consiste à faire les chambres d’un hôtel, le matin. Elle ne bénéficie que d’un temps partiel et aimerait faire plus d’heures pour compléter ses revenus. D'autant plus qu’elle n’a pas de logement et qu’elle doit vivre dans sa voiture, une Volvo hors d’âge qu’elle doit maintenir en état à tout prix pour honorer son contrat de travail. La position devient encore plus fragile lorsqu'une jeune et zélée collègue de Louise, interprétée par Marie Kremer,  n’hésite pas à jouer de ses charmes pour s’attirer les faveurs du chef pour faire embaucher sa belle-sœur. Ce que le manager acceptera en commentant en ces termes «  si elle est comme vous, on n’aura pas de problèmes ».
Pour Louise la situation est inextricable : elle a de plus en plus de mal à conserver le niveau d'hygiène nécessaire à son emploi, et s'arrange en "empruntant" des savons ou des produits alimentaires destinés au petit-déjeuner dans la réserve de l'hôtel ou profitant de la douche du foyer où elle assure des missions de baby-sitting qui lui assurent un complément de revenus. Elle développe un esprit d'adaptation, compte sur quelques rencontres : la gérante d'un bar qui l'héberge et fait office de poste restante et l'un des clients de ce bar qui aide Louise à réparer sa voiture, et qui l'accompagnera dans la scène ultime du déménagement vers l'appartement qu'elle obtiendra finalement.
Entre-temps, elle aura dû vivre quelques moments pathétiques : abandonner son mobilier resté dehors chez son ex, ou entendre sa fille lui annoncer qu'elle s'installe avec son petit ami, alors qu'elle même est à la rue. Le tout est traité sans tomber dans le mélodramatique mais tout en retenue, et là réside certainement tout le talent du réalisateur, Cyril Mennegun, et sans conteste celui de l'époustouflante Corinne Masiero dans le rôle de Louise.
Dans le registre du monde professionnel puisque c'est celui qui nous intéresse, quelques scènes montrent Louise au travail avec sa collègue Séverine (Marie Kremer) ou avec le manager de l'hôtel. Ce dernier est exigeant sans être tortionnaire, mais contestera les heures supplémentaires déclarées par Louise mais sans que l'on sache si c'est elle qui gonfle son crédit où si c'est le responsable qui rechigne à lui régler.
Cet excellent film a été sélectionné à 30 reprises dans différents festivals à travers le monde et a obtenu le César du meilleur premier film (2013) et le Prix Louis-Delluc du meilleur premier film (2013)

mardi 29 juillet 2014

Un odieux chantage au licenciement dans "Deux jours, une nuit" le dernier film des Dardenne

Selon certains experts, ce film des frères Dardenne, Jean-Pierre et Luc, est le grand absent du palmarès du dernier festival de Cannes. Si nous n'émettrons aucun jugement sur la qualité du film, il apparaît que la trame en soit pour le moins fantaisiste au regard du droit du travail et des pratiques en entreprises en matière de licenciement.
En l’occurrence, un patron met dans les mains de ses salariés, le marché suivant : ils encaisseront  leur prime annuelle d'un montant de mille euros à condition que leur collègue Sandra, interprétée par Marion Cotillard, soit licenciée.
Il n'est certes pas impossible qu'un tel comportement puisse se rencontrer dans le monde cruel de l'entreprise, mais un employeur prendrait-il le risque de se faire sanctionner par les autorités, car il est facile d'imaginer que, très vite, l'affaire aurait été jetée en pâture aux medias.
Cette licence que s'autorisent les réalisateurs belges leur permettra de sonder la noirceur ou la beauté des âmes, dans ce nouvel opus d'un genre dont ils ont le secret, la "comédie sociale". Un jugement que ne partage peut-être pas le jury du festival.

dimanche 27 juillet 2014

L'Open Space version années 70 dans un film de Robert Enrico "Pile ou face" (1980)

Des acteurs français de premier plan, Philippe Noiret et Michel Serrault, un talent en devenir Pierre Arditi et une actrice inattendue, Dorothée, l'animatrice vedette des mercredi après-midi destinés à la "jeunesse"d'Antenne 2, constituent le principal du casting de ce film de Robert Enrico. La trame tient en haleine le spectateur, même si l'on sait dès le début que Edouard Morlaix, modeste comptable, a précipité par la fenêtre son épouse devenue insupportable, sous les yeux pratiquement de la voisine d'en face, présentatrice sur la chaîne de télévision régionale, ou plutôt "speakerine", comme on disait à cette époque.
Si l'on voit souvent les policiers en action pendant ce long métrage, peu de scènes montrent l'employé sur son lieu de travail cependant l'une d'entre elles est assez intéressante. : Edouard y est assis à son bureau, aligné avec celui de ses collègues, tous tourné vers "l'aquarium" vitré et surélevé de celui que l'on imagine être le chef de service qui leur fait face. Une disposition classique des pools de saisies ou des open space à la française des années 70.
Bien qu'acteur de cinéma encore peu expérimenté puisqu'il n'apparaît que pour la 5ème fois à l'écran avec "Pile ou face", Pierre Arditi apparaissait l'année précédente dans le film d'Alain Resnais "Mon oncle d'amérique"  cité sur ce même blog.