lundi 25 mai 2015

Une unité de sablage dans "Le jour se lève", le chef d'oeuvre de de Marcel Carné (1939)

"Le jour se lève", le film de Marcel Carné,  est avant tout un drame. C'est aussi une réflexion sur le sort des ouvriers, avec peut-être un parallèle avec la vie d'artiste ou de bohème personnifiée par Valentin (Jules Berry) le dresseur de chiens que tout oppose à François le sableur (Jean Gabin).
François est ouvrier dans un , il est affecté à une unité de sablage, endossant chaque jour sa combinaison qui ressemble à un scaphandre et manipulant une lance projetant du sable et de l'abrasif dans le but de décaper de grosses pièces usinées.

L'atmosphère est hostile, au point de flétrir en quelques minutes le bouquet que tient Françoise, la fleuriste (Jacqueline Laurent) en visite dans les ateliers. Ce sera leur première rencontre et l'unique plan tourné au sein de l’usine. Pour atténuer les effets de la poussière produite par la projection de sable, François boit régulièrement du lait dont il propose un verre à la jeune femme, tandis qu’un de ses collègues préfère le vin, sans pour autant que Carné ne fasse allusion aux problèmes d’alcoolisme du monde ouvrier.
L'entreprise représenterait même ici la vertu, car à la blancheur du lait il faut ajouter la propreté du prolétaire qui se lève chaque matin et, qui déclare avec certes une pointe d'ironie "le travail c'est la santé et la liberté". "Y'a une bonne petite place à prendre" lancera-t-il avec un peu plus de sarcasme aux badauds , alors qu'il est sur le point d'être arrêté par les policiers. 
A l'opposé, Valentin représente le vice, le mensonge et la manipulation, pour lui le travail de François est "malsain", et pas seulement au sens propre du terme. L'ouvrier de son côté considère que les bonimenteurs de son espèce sont comme "le sable en dedans" qui peu à peu dévore les poumons du sableur, au point que ses collègues doutent que les gaz lacrymogènes utilisés par les forces de l'ordre pour le déloger de sa chambre où il s'est retranché puissent avoir de l'effet.
Et c'est la sonnerie du réveil-matin de l'ouvrier qui ponctue le chef d'oeuvre de Carné juste après que François  se soit donné la mort.
Si l'entreprise ne fait l'objet que d'un seul plan, il est à noter le niveau de modernité des équipements et des postures de ce poste de sablage pour un film qui remonte à 1939.


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